Qui est Tibo InShape, le «Cyril Hanouna de YouTube» qui va débattre avec Emmanuel Macron ?
C’est demain, mardi 13 mai à 20h10, qu’Emmanuel Macron sera en direct sur TF1 pour une émission politique de deux heures consacrée aux «défis de la France». Une soirée présentée par Gilles Boulleau qui sera rejoint, pour l’occasion, par une kyrielle d’invités aux profils divers et variés : de Sophie Binet de la CGT au maire de Béziers Robert Ménard en passant par l’activiste Salomé Saqué... et le premier Youtubeur de France: Tibo InShape.
Sur cette plateforme incontournable du paysage audiovisuel français, Thibault Delapart règne en maître incontesté. Le 26 mai 2024, il devenait le créateur de contenu français le plus populaire en dépassant les historiques Squeezie, Cyprien et compagnie. Une ascension fulgurante qui n'est pas que la traduction du succès d'un homme acharné de travail ; elle est aussi le symbole de l'évolution de YouTube et de l'ensemble des médias aujourd'hui. Car, au-delà des vidéos où ce trublion surexcité, qualifié « d'humoriste bon enfant et populaire » par certains et de « facho sympa qui a l'air un peu idiot » par d'autres, il y a un positionnement qui – à en croire le résultat – porte ses fruits.
Un vidéaste qui s’engage
« Facho » ? C'est ce que pensent deux journalistes du média Blast, selon qui l'influenceur diffuserait des idées politiques « nationalistes » et « réactionnaires » dans ses vidéos (il avait décidé de porter plainte contre eux). Il a notamment participé à la promotion de plusieurs organes dépendant de différents ministères comme l'administration pénitentiaire, les CRS ou encore le SNU (service national universel) en apparaissant, à cette occasion, aux côtés de l'actuel premier ministre Gabriel Attal.
Sur ce premier point, il est vrai que Thibaud Delapart franchit un Rubicon que beaucoup de youtubeurs de son calibre avaient choisi de ne jamais dépasser : celui de donner une couleur politique ou idéologique à ses contenus. Là-dessus, il n'est aujourd'hui plus seul. « Il y a la même chose mais à gauche, avec notamment des positions prises sur l'actualité récente, comme ce qui se passe en Israël », nous confie anonymement un acteur important du milieu. Le 22 juin, dans un entretien à Brut, il s’affirme «de droite», «mais humain avant tout» et se dit prêt à être ministre des Sports. «Que ce soit extrême gauche, extrême droite, à condition que je ne sois pas bloqué dans mes prises de décisions (...), je ne suis pas bloqué par rapport à ça.»
Des contenus à forte audience
Mais derrière une idéologie présumée ou avérée, Tibo InShape, c'est avant tout une stratégie. Celle de capitaliser sur les « shorts », les vidéos ultracourtes diffusées sur YouTube en marge des formats classiques, souvent plus longs. « C'est quelqu'un qui vient des réseaux sociaux comme TikTok et qui a su exploiter ces nouveaux codes », analyse pour nous Cyril Attias, PDG de l'agence marketing d'influence ADMS Paris. « En mettant à disposition des contenus humoristiques courts, sans paroles ou en anglais, il élargit son audience de départ. » Des formats que les créateurs de contenu historiques (comme Cyprien, qu'il a dépassé, et Squeezie) n'ont pas cherché à conquérir faute de temps, de moyens et sans doute d'envie.
Autre différence : sa capacité à traiter des sujets tous azimuts. Là où les « anciens » de YouTube imitaient malgré eux la télévision en proposant sur leurs chaînes des thématiques précises sans jamais vraiment s'en éloigner, Tibo InShape – qui a débuté avec des vidéos de musculation – ne s'interdit rien. Et de passer d'une vidéo intitulée « J'ai survécu 60 jours sans films porno » (sic) à une autre où il interviewe un transgenre avant de revenir à ses fondamentaux en affrontant le phénomène français du MMA Benoît Saint Denis.
Cette spontanéité et ces imprévus expliquent sans doute sa réussite. Une méthode qui fait d'ailleurs écho à celle du titan du PAF Cyril Hanouna, qui racontait encore récemment comment cette imprévisibilité était au cœur de son succès car elle rendait son émission (en direct et avec des surprises) plus authentique face à la linéarité des autres programmes. Un style privilégiant la quantité à la qualité, selon certains observateurs, mais qui achève cette époque où les personnalités fortes et identifiées remplacent les grandes marques comme reines de la scène médiatique. Et au-delà. Quand on lui demande s'il envisage de se lancer en politique, il répond : « On verra, il ne faut jamais dire jamais. »