Il compte bachoter jusqu'au grand départ du Havre dimanche 26 octobre. Le stress monte en tout cas pour l'ultra-traileur Mathieu Blanchard, qui s'est donné comme défi de faire la transatlantique en double Café L'Or (appelée Transat Jacques-Vabre jusqu'en 2024). Il embarque à bord de l'Imoca MS Amlin, en compagnie du skipper néo-zélandais Conrad Colman.
"On va voir si je plie mieux la voile que mes tee-shirts", glisse avec un grand sourire Mathieu Blanchard, au moment d'actionner le winch, la manivelle qui contrôle la voile. Un peu d'humour pour ne pas penser à la pression qui monte à deux semaines du départ de la 17e édition de la Transat Café L'Or.
"Si tu es stressé et que tu as peur, c'est que tu as choisi le bon projet !"
Mathieu Blanchardà franceinfo
Même si l'aventurier a grandi au bord de l'eau en Guadeloupe, avant de devenir moniteur de plongée sous-marine, puis coureur professionnel et de s'imposer comme l'un des meilleurs traileurs du monde en quelques années, le défi d'une transatlantique est de taille. Surtout que Mathieu Blanchard n'a eu qu'un seul été pour se préparer à relier l'Europe à l'Amérique à l'aide d'un monocoque de 60 pieds.
"Je me cognais partout, raconte-t-il au micro de franceinfo. Conrad, derrière moi, me disait : 'Attention, ne va pas là, c'est dangereux ! Tu vas taper la bôme (barre horizontale de la voile), fais gaffe !"
En élève assidu, Mathieu Blanchard a enchaîné les semaines de pratique, a suivi des stages de survie, de radiotéléphonie, et a beaucoup bachoté : "J'ai acheté cette grosse bible qu'est Le Cours des Glénans, je suis en train de le poncer. Et j'ai lu des récits d'Éric Tabarly, de Bernard Moitessier…"
Pour valider son ticket et participer à cette transatlantique, le duo a dû naviguer 1 000 milles nautiques, huit jours en mer, avec parfois des rafales à 50 nœuds en pleine nuit. "Ça bouscule, ça saute", raconte Mathieu Blanchard. "Il y a des énormes vagues qui passent par-dessus nos têtes, ça fait très très peur. Vraiment, je me suis senti tout petit, mais c'est ce qui me rend vivant".
Un "duo atypique" pour aller chercher "autre chose que la performance"
Même s'il découvre le monde de la voile professionnelle, l'ultra-traileur peut compter sur certains atouts : sa condition physique, sa gestion du sommeil, et son habitude à endurer une alimentation spéciale sur l'Imoca, comme en course de fond. "Je vais prendre des petites barres ou des gels pour avoir de l'énergie quand il y a un peu de sprint pour manœuvrer le bateau, comme quand je cours et que je dois monter un col", décrit-il.
Cependant, personne ne se fait d'illusion. Malgré toute son implication lors de cette préparation ces derniers mois, Mathieu Blanchard n'aura pas le niveau pour être un compétiteur sérieux lors de cette Transat Café L'Or 2025. Ce choix de co-skipper est parfaitement assumé par Conrad Colman. "Si on parle purement sport, clairement, c'est un handicap", résume le Néo-Zélandais, 21e du dernier Vendée Globe. "Il faut que je prenne soin de lui, que je veille à sa sécurité, que je le briefe... et du coup, tout ça s'ajoute à la charge mentale".
Conrad Colman est pourtant très fier de faire partie de ce "duo atypique". "Je suis content de faire autre chose que de la perf." Après leur arrivée à Fort-de-France, les deux compères échangeront les rôles. Ce sera au tour de Conrad Colman de se lancer dans la course à pied. Le duo va courir la TransMartinique. Au programme : 134 km pour Mathieu Blanchard, tandis que Conard Colman, blessé au genou, s'est donné comme défi de dépasser les 20 km de course.