Lionel Richie a fait chavirer Bercy, all night long

C’est l’un de ces soirs magiques où vous comprenez dès la porte de la salle poussée que vous allez passer un bon moment «all night long.» Ce jeudi 26 juin, dans un Bercy plein à craquer, les spectateurs de tout âge, autant de filles que de garçons, multiplient les hola au son de P.Y.T de Michael Jackson. Peu importent les catégories sociales, tout le monde se parle. L’ambiance rappelle celle du mémorable concert de Quincy Jones à Bercy en 2019. Au pied de la scène avancée jusqu’à un tiers de la fosse, le fan-club international de Lionel Richie s’est positionné des deux côtés. Certains sont venus d’Atlanta en Georgie, d’autres du Caire en Egypte. Gilbert Montagné est là, Adriana Karembeu resplendit.

À 21h16, le noir se fait. Une épaisse fumée encadrée par un rideau de faisceaux blancs s’élève. Lionel Richie jaillit du sol en veste immaculée. «Hellooo, is it me you’re looking for ?» A 76 ans, sa coupe afro est désormais courte mais il a toujours sa fine moustache à la Rhett Butler. La voix est là. Cet immense artiste est né en 1949 dans l’Alabama au temps de la ségrégation. Jeune homme, il a tourné avec les Jackson Five avant de signer à la Motown. Vedette du groupe funk et soul des Commodores, il a fait une carrière solo extraordinaire dans les années 1980. Six décennies après ses débuts, à l’ère de l’intelligence artificielle, Lionel Richie est toujours là. Auteur-compositeur d’une foule de tubes planétaires et intemporels, il s’est lancé dans une tournée Say Hello to the hits qui s’achèvera à Madrid début août.

Une vingtaine de tubes en deux heures

Richissime, ce Californien d’adoption est là uniquement car il en a envie. Il envoie des baisers de la main, ouvre grands bras comme pour embrasser la foule, l’applaudit, lui fait la révérence. «We loooove you», lui crie Bercy déchaîné. Il va enchaîner une vingtaine de tubes en deux heures. Avec lui, pas de temps mort avec scène vide où le public est prié de patienter en regardant des vidéos. Ballade, soul, reggae, funk, valse, R&B... Les genres musicaux défilent et révèlent son génie d’auteur-compositeur. «Vous vous êtes fiancés, mariés, séparés et tout le business... sur mes chansons», plaisante-t-il. Il alterne des titres au tempo lent comme Three Times a Lady où il joue sur son immense piano blanc avec des morceaux très dansants tel Brick House/Fire et Dancing on the ceiling.

D’emblée, Bercy s’est transformé en karaoké, en discothèque géante. Sur Truly, Lionel Richie a des airs de Frank Sinatra. Sur Endless Love, il demande aux garçons de prendre les filles dans leurs bras et de dire «Isn’t Lionel amazing ? » «Je vous promets, le reste de votre nuit sera amazing.» Il réussit à faire croire à tout Bercy que Diana Ross va le rejoindre sur scène. Endless Love, duo de 1981 est l’un des plus grands succès de leurs carrières respectives. La diva n’arrivera jamais. Des huées éclatent. «Cela fait 41 ans que je demande à Miss Ross de me rejoindre sur scène. Si vous êtes fâchés, mettez-vous à ma place, 41 ans !! On va lui montrer ce qu’elle manque. Ce soir, les filles, vous êtes Diana ! Et moi, je vais être... moi.» Tout le monde debout chante à poumons déployés. Après s’être concentrée sur Monaco, Londres et les Pays de l’Est seuls capables de lui verser les avances exigées, la diva de 80 ans fera son grand retour en France, ici même à Bercy, le 6 juillet. On verra bien comment elle présentera Endless Love.

Scénographie des années 1980

Le show de Lionel Richie n’a rien à voir avec ceux si formatés de Taylor Swift et Beyoncé. Il échange avec le public sans cesse. Il est foncièrement sympathique et drôle. «Je parle un petit peu français, dit-il avant d’enchaîner en anglais... avec l’accent français. Vous n’avez pas idée mais je viens très souvent à Paris. À chaque fois, je me dis à si je pouvais être sur scène ici maintenant ! Ce soir, je ressens la magie dans l’audience, c’est amazing ! « Il s’amuse avec ses musiciens, marche à pas cadencés avec eux en file indienne. La complicité est évidente. Son saxophoniste le suit comme une ombre dans son dos. Lionel Richie se retourne. Il le fait applaudir, fait mine d’être agacé par les ovations et tente sans succès de le renvoyer en fond de scène. La scénographie a un côté années 1980 avec ses faisceaux violets et ses vidéos sur soleil couchant mais tout est pensé pour que le public le voie bien lui et ses six musiciens. Tous sont surélevés sur des estrades. Sur l’avant-scène, un espace se déplie vers le haut. Il permet à Lionel Richie de jouer du piano à cinq mètres du sol. Rien à voir néanmoins, avec la performance de Santa qui, telle Mary Poppins, vole avec son piano dans les grandes salles.

Sur le coup de 22h50, la fin du concert approche. Après Say you say Me, il lance We are the world coécrit avec Michael Jackson en 1985. Avec ce tube, ils ont récolté plus de 50 millions de dollars pour lutter contre la famine en Éthiopie. «Je veux le dire ce soir, nous sommes venus de partout. Nous sommes un melting-pot. On veut nous diviser, nous faire croire que nous ne sommes pas faits pour nous entendre». Il ne prononce pas le nom de Donald Trump, Benyamin Netanyahou, Vladimir Poutine, l’Ayatollah Khamenei ni ceux des mouvements d’extrême gauche et des féministes radicales mais tout le monde a compris. Il file enfiler une veste rouge de dresseur de cirque et la soirée s’achève en apothéose sur All Night Long. Fiesta for ever. Si Lionel Richie revient en concert en France, il faudra s’y précipiter.