Quand les joailliers ont la main verte

Comme toutes les couleurs, il a connu des hauts et des bas. Et s’il a actuellement une connotation plutôt positive (symbole de la nature et de l’écologie, de la fraîcheur et de la prospérité), il n’en a pas toujours été ainsi. Teinte des super-héros et des Martiens, du dollar et des tapis de jeux, le vert est l’emblème du pouvoir dans l’Antiquité, mais du mal au Moyen Âge. Au théâtre, aujourd’hui, il porte malheur, car, selon une (fausse) légende, Molière le portait sur scène pour sa dernière représentation du Malade imaginaire, le 17 février 1673, quelques heures avant sa mort.

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En joaillerie, la plus précieuse des pierres vertes, l’émeraude, était la préférée de Cléopâtre, tandis que Néron la portait en monocle pour regarder les combats des gladiateurs. Les gemmes brutes sont confiées aux tailleurs les plus délicats et expérimentés, car leur matière est friable et fragile. Contrairement aux autres pierres précieuses, très prisées quand elles sont pures, les inclusions de l’émeraude (que les gemmologues appellent un «jardin») font sa valeur. Les plus recherchées proviennent de Colombie, mais de beaux spécimens viennent aussi d’Afrique, notamment de Zambie.

L’éclat et la rareté des tsavorites lui font concurrence depuis quelques années. Ce grenat vert intense a été découvert à la fin des années 1960 par le gemmologue écossais Campbell R. Bridges en Tanzanie, à la frontière du Kenya. Outre la malachite et la jadéite, qui s’arrogent une belle notoriété, il faudrait citer la chrysoprase dont la lumière fraîche et laiteuse égaie de plus en plus les vitrines des joailliers et qui, en lithothérapie, symbolise la compassion et la douceur. Elle est surtout l’une des plus anciennement utilisées par l’homme à travers l’histoire. Et serait, d’après saint Jean dans l’Apocalypse, une des douze pierres ornant les fondements de la muraille de la Jérusalem céleste.