Train de vie, primes, gestion budgétaire : le CESE épinglé par un rapport de la Cour des comptes
C’était, il y a encore quelques semaines à peine, l’une des pistes phares du gouvernement de François Bayrou pour renflouer les comptes publics : faire la chasse aux agences publiques jugées redondantes ou inutiles. Pour boucler rapidement un budget 2025 sur lequel son prédécesseur s’était cassé les dents, le premier ministre et son équipe avaient promis des fusions et suppressions parmi les quelque «1000» structures financées par la collectivité. L’Ademe, l’Agence bio ou encore l’Office français de la biodiversité (OFB) avaient tour à tour été la cible de critiques de parlementaires venus de tous horizons. La nouvelle piste d’économies pourrait bien concerner le Conseil économique, social et environnemental (CESE).
La «troisième assemblée» est la cible d’un «rapport d’observations provisoires» accablant de la Cour des comptes, comme l’a révélé Le Canard enchaîné sur son site internet le 11 mars dernier. Au CESE, «on travaille peu mais on vit confortablement» résument nos confrères. Créé en 1946, le Cese représente les organisations de la société civile dans un rôle consultatif auprès du gouvernement et du Parlement, pour lesquels il rédige des avis. Difficile, pour un Français non averti, de distinguer ses missions de celles d’autres opérateurs publics comme le Haut-commissariat au plan (HCP), le Conseil d’analyse économique (CAE), le Secrétariat général pour l’investissement (SGPI) ou encore France Stratégie.
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«Pas possible de se faire une idée de la situation budgétaire réelle»
D’autant que le premier ministre n’a saisi le CESE qu’à douze reprises en cinq ans. Le Sénat et l’Assemblée nationale ? Quatre fois durant cette même période. La Cour des comptes chiffre ainsi à 1,4 million d’euros le coût moyen d’un rapport du CESE. De quoi faire rougir McKinsey, un autre de ses concurrents sérieux. Mais c’est surtout la gestion budgétaire de l’institution qui interpelle les Sages de la rue de Cambon. Ils notent que «les informations qu’il fournit sur sa situation financière sont extrêmement succinctes» et qu’il n’est «pas possible de se faire une idée de la situation budgétaire réelle». Le budget annuel alloué (45 millions d’euros en 2023) au CESE est loin d’être entièrement utilisé puisqu’il resterait environ 18 millions d’euros «dans les caisses».
Ce qui n’empêche pas une politique de rémunération et d’avantages généreuse pour les 175 membres de l’institution du palais d’Iéna (Paris, 17e arrondissement), issus de la société civile (syndicats, associations, personnalités qualifiées, etc), ainsi que ses 155 agents. «Les 10 rémunérations les plus hautes représentaient 2.026.284 euros en 2023», soit plus de 200.000 euros annuels par tête, indique le document. Un temps cité pour Matignon, le président, Thierry Beaudet, bénéficie d’un logement de fonction et d’un véhicule qui n’avaient pas été déclarés aux impôts par le Conseil avant mai 2023, avance le rapport, toujours selon nos confrères. Il touche par ailleurs 1977,32 euros brut d’indemnité de base, auxquels s’ajoutent notamment 7414,94 euros brut d’indemnité de fonction président, selon le Cese.
54 jours de congés annuels
Le secrétaire général et ses émoluments élevés pour un travail «pas complètement défini» sont également particulièrement écornés. Le rapport épingle par ailleurs les primes des membres qui n’ont pas «d’équivalent dans la fonction publique», leurs 54 jours de congés annuels (contre 40 pour la moyenne nationale) et leurs frais en tous genres, des déplacements aux restaurants en passant par les habits et la garde des enfants. Cerise sur le gâteau, les membres qui manquent une ou plusieurs séances peuvent «ne faire l’objet d’aucune pénalité».
Contacté par Le Figaro, le CESE confirme indirectement l’existence de ce rapport, regrettant la «publication d’informations non définitives» dans cet «article à charge» du Canard Enchaîné, alors que la «phase contradictoire n’est pas terminée». L’institution précise qu’elle réserve ses commentaires pour la Cour des comptes et «apportera de nombreuses rectifications sur des éléments et analyses qu’[elle] juge erronés voire infondés».