Face à la tenaille russe, l’armée ukrainienne annonce se retirer de la ville de Vouhledar, forteresse du sud du Donbass
Vouhledar est redevenu Ougledar, se félicitent déjà les nationalistes russes sur les réseaux sociaux, reprenant le patronyme russe de la commune ukrainienne du Donbass dans l’est du pays. Alors que plusieurs sites de cartographie du conflit, fondés sur des vidéos géolocalisées, annoncent la chute de Vouhledar depuis mardi - y compris la carte DeepState Map, proche de l'armée ukrainienne -, cette dernière a reconnu ce mercredi qu’elle se retirait de cette ville lourdement fortifiée, tenue jusqu’à présent par la 72e brigade mécanisée.
«Le haut commandement a donné son autorisation à la manœuvre de retraite de Vouhledar pour permettre de sauver les hommes et l'équipement militaire, et de prendre de nouvelles positions pour la suite des opérations», a indiqué sur Telegram le groupement de forces Khortytsia, en charge des opérations dans la zone. Dans son point presse quotidien, le ministère russe de la Défense n’a pas revendiqué, de son côté, la prise de la ville, mais les autorités militaires russes ont néanmoins expliqué auprès de l’agence de presse étatique Tass que «le groupement ennemi à Vouhledar avait été pratiquement éliminé» et qu’il avait subi «d'énormes pertes».
Manœuvre d'enveloppement
La ville minière servait de véritable verrou défensif au Sud-Donbass, après avoir résisté depuis le début de la guerre à tous les assauts mécanisés. En janvier et en septembre 2023 notamment, les Russes avaient perdu des dizaines, voire des centaines de blindés et de chars, détruits par l’artillerie ukrainienne et les champs de mine installés depuis des mois.
Incapable de prendre frontalement la ville, située sur des hauteurs avantageuses pour le défenseur, le groupe d'armées russe «Vostok», et notamment la 29e armée, a entrepris au cœur de l’été une manœuvre d’enveloppement de Vouhledar par l’Ouest et par l’Est. Au cours du mois de septembre, la conquête à 5 kilomètres plus au Nord du village de Vodyane et des mines de charbon adjacentes, ainsi que la prise de contrôle de la route-clé menant au Nord vers Kostyantinivka, a été un point de bascule, permettant aux Russes d’occuper à leur tour des points hauts afin de dominer la forteresse ukrainienne. La situation était «critique», glissait déjà la semaine dernière une source militaire française au Figaro, alors que les deux pinces de la tenaille russe se refermaient sur les combattants de la 72e brigade mécanisée ukrainienne encore présents dans la localité assiégée.
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En deux ans de guerre, la ville dont la silhouette est dessinée par de hauts immeubles dominant la plaine environnante a été ravagée par les bombes planantes larguées par les chasseurs-bombardiers Soukhoï et les munitions thermobariques tirés par les TOS-1A chenillés russes. En ruines, Vouhledar est devenu un amas de béton encore fumant, mais l’issue de cette bataille offre malgré tout aux Russes un avantage opératif important à l’échelle du Sud-Donbass. Déjà, ils poussent au Nord vers les villages de Bohoyavlenka et de Novoukrainka, et menacent par le Sud une autre place forte ukrainienne, Kourakhove, déjà attaquée par l’Est et par le Nord depuis le large saillant russe allant d’Avdiivka vers Pokrovsk. Alors que les Russes sont à l’initiative dans tout le Donbass et y gagnent chaque jour entre 10 et 15 km2 de terrain, une nouvelle manœuvre d’enveloppement se dessine déjà dangereusement pour les Ukrainiens.