Retraites, immigration, travail... Dans chaque camp, la foire aux idées de référendums

Dans ses vœux du 31 décembre, Emmanuel Macron l’avait évoqué dans une simple allusion, sans en prononcer le mot. Depuis, le chef de l’État réfléchirait sérieusement à convoquer un référendum. Il devrait même prendre la parole pour ce chantier de la «démocratie directe» avant le printemps. En attendant, plusieurs responsables politiques tentent de pousser leurs idées de questions à poser aux Français, vingt ans après la dernière consultation nationale.

Dans le camp présidentiel, un vaste référendum sur le «travail»

Depuis l’arrivée du chef de l’État au pouvoir en 2017, la carte du référendum est revenue à plusieurs reprises sur la table, sans jamais avoir été dégainée. Le patron du parti présidentiel, Gabriel Attal, a pourtant cette fois esquissé un début de proposition : une consultation sur le «travail» et le modèle social. «Il faut un référendum pour renverser la table, changer notre modèle, et redonner de l’air aux Français qui travaillent», a-t-il avancé, le 29 janvier dernier, sur le plateau de France 2.

L’ancien premier ministre a donné trois mois à ses troupes pour mûrir une «proposition» qui, si elle ne peut pas être adoptée au Parlement, pourrait se transformer en projet de loi référendaire. «C’est-à-dire une réforme qui permet tout simplement de dire qu’on allège le fardeau fiscal qui pèse aujourd’hui sur le travail et sur ceux qui travaillent», a-t-il développé, sans préciser la question qui pourrait être soumise aux Français.

L’idée a en tout cas été saluée par la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin. «Poser la question du modèle social français n’est pas inintéressant. C’est une bonne question de savoir qui finance notre modèle social, pour répartir différemment l’effort de la nation», a-t-elle ainsi loué ce lundi sur Sud Radio.

Pour la gauche, priorité sur les retraites et les institutions

Les forces de gauche avaient déjà tenté, en vain, de soumettre l’âge de départ à la retraite à un référendum d’initiative partagée (RIP). L’initiative, lancée au lendemain de la réforme contestée d’Élisabeth Borne, s’était finalement heurtée au rejet du Conseil constitutionnel, qui l’avait jugée irrecevable. Alors que des discussions ont été ouvertes avec François Bayrou pour «trouver des compromis», les principaux dirigeants du Nouveau Front populaire (NFP) poussent pour soumettre l’épineux dossier au référendum.

Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, plaide ainsi pour poser une question sur le financement des retraites. Ce qui reviendrait donc à interroger les Français sur les possibilités de financer le système autrement que par le recul de l’âge de départ à la retraite. Surtout si la conférence sociale entre les syndicats et le patronat ne débouche sur «aucun accord», a-t-il précisé à La Tribune Dimanche. Quand son homologue insoumis, Manuel Bompard, propose toujours - et sans illusions - de trancher l’abrogation de la retraite à 64 ans par référendum.

Dans la foire à idées, Marine Tondelier a quant à elle avancé celle d’un grand chantier sur les institutions. «La seule question que le chef de l’État doit poser, c’est: “Êtes-vous d’accord ou non pour la mise en place d’une (assemblée) constituante chargée de proposer une nouvelle Constitution pour notre pays?”», a estimé samedi la patronne des Écologistes dans un entretien à Ouest-France. Une manière de tourner la page d’«institutions fatiguées» et «mal adaptées à un contexte politique qui fait du bipartisme un souvenir lointain», a-t-elle justifié.

À droite et au RN, une demande récurrente sur l’immigration

La droite en a depuis longtemps fait l’une de ses priorités. En mars 2024, Les Républicains (LR) avaient déjà tenté de sonder les Français sur l’immigration par le biais d’un référendum d’initiative partagée - finalement retoquée par le Conseil constitutionnel. Deux ans plus tard, Bruno Retailleau, désormais à Beauvau, juge toujours aussi «nécessaire» d’interroger le pays sur «le phénomène qui a le plus bouleversé la société française depuis un demi-siècle, sans que les Français aient jamais été consultés», a-t-il avancé dans un entretien au Journal du Dimanche (JDD).

Problème, le champ de l’article 11, qui définit les contours d’un référendum, limite son recours aux seules questions économiques, sociales ou environnementales - excluant ainsi celles liées aux politiques migratoires. Pour entrer dans les clous, le ministre de l’Intérieur imagine donc soumettre un projet de loi sur un délai de carence avant que les étrangers puissent bénéficier des allocations familiales. Une idée sur laquelle s’est également aligné le patron des députés LR, Laurent Wauquiez.

Le Rassemblement national (RN) s’est lui aussi saisi de l’occasion pour demander à nouveau un référendum sur l’immigration. Comme son allié Éric Ciotti, Marine Le Pen réclame notamment de trancher la suppression du droit du sol, alors que l’Assemblée nationale vient d’adopter une proposition de loi pour en restreindre les conditions à Mayotte. «Ça fait 25 ans qu’on débat de ça, ça commence à bien faire. Il y a une chose qui est mieux que le débat, c’est le vote (...) On propose aux Français de donner leur avis et on va le respecter. Moi, il n’y a que ça qui arrivera à me convaincre», a-t-elle fait valoir samedi, en marge d’un déplacement à Madrid.