Le plan Trump pour Gaza "prend forme" selon un ministre israélien, des négociations attendues à Doha
Le projet controversé de Donald Trump de déplacer de force les Palestiniens hors de la bande de Gaza "prend forme", a affirmé dimanche 9 mars le ministre des Finances israélien Bezalel Smotrich, figure de l'extrême droite.
"Ce plan prend forme, il y a des actions en cours, en coordination avec l'administration" américaine, a-t-il assuré devant un groupe de travail de parlementaires, précisant notamment qu'il fallait "identifier les pays" d'accueil.
Début février, Donald Trump a lancé l'idée d'une prise de contrôle de la bande de Gaza par les États-Unis pour la reconstruire en vue d'en faire la "Riviera du Moyen-Orient". Pour cela, ses habitants pourraient être déplacés vers l'Égypte et la Jordanie – deux pays voisins qui ont rejeté cette option.
Comme les Palestiniens, les États arabes, ainsi que de nombreux autres pays à travers le monde, ont récusé toute idée de départ des quelque 2,4 millions d'habitants de la bande de Gaza.
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Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu s'était quant à lui engagé à respecter la proposition de Donald Trump après l'avoir accueillie avec enthousiasme.
Mi-février, le ministre de la Défense israélien Israël Katz, avait annoncé la création d'une "agence spéciale" au sein de son ministère pour le "départ volontaire" des habitants de Gaza.
"Un changement historique au Moyen-Orient et pour l'État d'Israël"
"Des préparatifs sont également en cours pour créer une autorité d'immigration de grande envergure au sein du ministère de la Défense, car il s'agit en fin de compte d'une opération logistique importante", a poursuivi Bezalel Smotrich devant des élus de plusieurs partis politiques.
"Cela a le potentiel de créer un changement historique au Moyen-Orient et pour l'État d'Israël", a estimé Bezalel Smotrich, tout en rappelant que le projet américain nécessitait "des pays prêts à [...] accepter" les déplacés, ce qui serait un processus, selon lui, "très, très, très long".
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Ces déclarations interviennent au moment où les médiateurs internationaux multiplient les efforts pour réduire les divergences entre le Hamas palestinien et Israël sur les modalités d'application de l'accord de cessez-le-feu dans la bande de Gaza.
Après plusieurs réunions au Caire avec le chef des services du renseignement égyptien Hassan Rashad, une délégation du Hamas menée par Mohammed Darwish s'est rendue dimanche à Doha, a dit à l'AFP un responsable du mouvement islamiste palestinien.
Israël a annoncé de son côté l'envoi lundi d'une délégation à Doha, à "l'invitation des médiateurs soutenus par les États-Unis", afin de "faire avancer les négociations". Selon des médias locaux, le cabinet de sécurité doit établir dimanche le cadre du mandat de cette délégation.
La première phase de l'accord, durant laquelle le Hamas a rendu 33 otages israéliens, dont les corps de huit otages morts, enlevés lors de l'attaque du 7-Octobre, et Israël a libéré environ 1 800 détenus palestiniens, s'est achevée le 1er mars.
Les désaccords entre les protagonistes portent sur le lancement des négociations sur l'application de la deuxième phase, qui prévoit, selon le Hamas, un cessez-le-feu permanent, le retrait complet israélien de Gaza et la libération des otages encore retenus – une soixantaine, dont plus de la moitié seraient morts selon l'armée israélienne.
Au Caire, les négociateurs du Hamas ont souligné "la nécessité de respecter tous les termes de l'accord, d'entamer directement les négociations pour la deuxième phase", a indiqué dimanche le mouvement dans un communiqué.
Réunion du cabinet de sécurité
"Nous exhortons les médiateurs en Égypte et au Qatar, ainsi que l'administration américaine à veiller à ce que l'occupant respecte l'accord, autorise l'entrée de l'aide humanitaire et procède à la deuxième phase selon les conditions convenues", a déclaré à l'AFP le porte-parole du Hamas, Hazem Qassem.
Ces conditions, a-t-il détaillé, comprennent un échange des otages contre des prisonniers palestiniens, "un retrait complet de Gaza, un cessez-le-feu permanent et complet, des garanties contre un retour [de l'armée israélienne à Gaza], la réouverture des points de passage et la levée du blocus".

Israël souhaite une extension de la première phase du cessez-le-feu jusqu'à la mi-avril. Il réclame la "démilitarisation totale" du territoire, le départ du Hamas de Gaza et le retour des derniers otages avant de passer à la deuxième phase.
Le Hamas, qui insiste pour rester à Gaza, où il a pris le pouvoir en 2007, réclame des négociations immédiates pour appliquer la deuxième phase.
Face à la position du Hamas, l'armée israélienne, qui contrôle les points de passage avec Gaza, a bloqué l'entrée de l'aide humanitaire vitale pour les quelque 2,4 millions d'habitants assiégés par Israël depuis 17 mois.
"La fermeture des points de passage menace la vie des malades à Gaza. Il y a une pénurie grave de médicaments, de respirateurs artificiels, de générateurs et d'oxygène", a affirmé un porte-parole du ministère de la Santé, Khalil Al-Dakran.
Du "sang sur les mains"
Signe de la fragilité du cessez-le-feu, l'armée israélienne a annoncé dimanche avoir mené une frappe aérienne contre des combattants palestiniens qui "tentaient de cacher un engin explosif dans le sol dans le nord de Gaza". Un nombre indéterminé de "terroristes" ont été tués, selon l'armée.
En riposte à l'attaque du 7-Octobre, Israël a juré de détruire le Hamas et lancé une offensive destructrice à Gaza qui a fait au moins 48 458 morts – en majorité des civils –, d'après les données du ministère de la Santé du Hamas, jugées fiables par l'ONU. Elle a aussi provoqué un désastre humanitaire dans le territoire palestinien.
L'attaque du 7 octobre 2023 a entraîné côté israélien la mort de 1 218 personnes, la plupart des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles et incluant les otages morts ou tués en captivité.

Sur les 251 personnes enlevées ce jour-là, 58 sont encore retenues à Gaza, dont 34 sont déclarées mortes par l'armée israélienne.
Lors d'un rassemblement à Tel-Aviv samedi, des proches des otages ont appelé à œuvrer en vue d'un accord qui permettrait de ramener tous les otages. "Si vous reprenez la guerre, les otages mourront à cause de vous. Vous aurez leur sang sur les mains", a averti à l'adresse de Benjamin Netanyahu Omri Lifshitz, dont le père Oded est mort en captivité.
Avec AFP