Rachida Dati : les objectifs de la ministre de la Culture, sur fond de disette budgétaire
Budget de la Culture, réforme de l'audiovisuel public, grands projets, ou encore restauration du patrimoine, Rachida Dati, va devoir s'atteler à des dossiers brûlants dans une période tendue pour les finances publiques.
- Un budget à conforter
C'est le chantier le plus urgent qui attend la ministre, alors que le gouvernement Barnier doit boucler, en théorie d'ici au 1er octobre, son projet de budget et cherche désespérément à faire des économies.
Peu après sa nomination en janvier 2024, Rachida Dati avait essuyé une première déconvenue en voyant le budget de la Culture amputé de 204 millions d'euros, sur un total d'environ 4,4 milliards, après cinq années de hausse. Le recours aux réserves du ministère avait permis de contrebalancer l'impact de ces coupes en région mais certains établissements nationaux, dont l'Opéra de Paris (qui doit faire avec 6 millions d'euros de moins), ont dû se serrer la ceinture.
Les premières indications pour 2025 n'annoncent pas d'embellie. D'après les plafonds de dépenses fixés par le gouvernement, le budget de la Culture resterait stable l'année prochaine en valeur absolue mais baisserait en termes réels en raison de l'inflation. Malgré les restrictions budgétaires, le plan de 98 millions d'euros sur trois ans annoncé par Rachida Dati en juillet pour favoriser l'accès à la culture en milieu rural est maintenu, assure-t-on dans l'entourage de la ministre. ce qui veut dire qu’il faudra trouver des économies par ailleurs.
- Réforme de l'audiovisuel public sur pause longue
Porté par la ministre, le projet d'une fusion de France Télévisions, Radio France, France Médias Monde (RFI, France 24) et l'Institut national de l'audiovisuel (Ina) était sur les rails au printemps. Mais ce n'est plus la priorité, considère-t-on rue de Valois. Rachida Dati prévoit des consultations pour envisager la suite.
Elle en est consciente: l'urgence est celle d'un financement de l'audiovisuel public pérenne et assurant son indépendance, l'échéance de fin 2024 pour faire passer un texte de loi approchant à grands pas. Il s'agit d'éviter que le Parlement ait à voter chaque année une enveloppe. Pour les médias, la ministre s'est fixé un autre objectif : donner une suite aux vastes États généraux de l'information, qui avaient été lancés il y a un an par Emmanuel Macron et dont les conclusions ont été rendues début septembre. Éducation aux médias, lutte contre les ingérences étrangères et actions au plan européen envers les grandes plateformes sont au menu.
- Revisiter le Pass culture
Dispositif phare de la politique culturelle d'Emmanuel Macron, le Pass culture pourrait être revu. Étrenné en 2019-2020, ce mécanisme, qui offre notamment un crédit individuel de 300 euros sur deux ans aux jeunes de 18 ans, a bénéficié à plus de 3,4 millions de personnes depuis sa généralisation en 2021.
Mais son efficacité pose question. Dans un rapport de juillet, l'Inspection générale des affaires culturelles a relevé la capacité « incertaine » du dispositif à « transformer les pratiques » et à combattre les inégalités d'accès à la culture. L'Igac appelle à réformer le Pass, qui a notamment fait exploser les ventes de mangas.
Rachida Dati a élargi le périmètre de ce dispositif, notamment aux MJC, mais doit composer avec son coût très élevé (260 millions d'euros par an) et veut s'assurer, selon son entourage, que les fonds permettent réellement de diversifier l'accès à la culture.
- Restitution des biens culturels, nominations
Promesse d'Emmanuel Macron en 2017, la restitution des biens culturels pillés pendant la colonisation, notamment en Afrique, doit être mise en musique par Rachida Dati. Si les grands musées - Quai Branly, Museum national d’Histoire naturelle...- se sont mis en ordre de marche pour identifier dans leurs collections ce qui pourrait être restitué, le projet de loi sur les restitutions d’œuvres d’art est à l’arrêt. Sa discussion au Parlement a été reportée à l’automne 2024, et les débats promettent d’être nourris.
Elle devra aussi nommer une nouvelle personne à la tête du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), qui brasse 770 millions d'euros par an et dont la présidence est vacante depuis le départ de Dominique Boutonnat, condamné pour agression sexuelle. Les présidents d’une kyrielle de musées, dont le musée national Picasso, seront par ailleurs en fin de mandat fin 2024 et en 2025.
Patrimoine
La ministre de la Culture et de la communication est désormais aussi celle du Patrimoine. En dehors de l’accompagnement de la réouverture de Notre dame de Paris, en décembre prochain, Rachida Dati va devoir trancher dans les priorités. Les grands musées, comme le Louvre, Orsay ou la Cité des Sciences et de l’Industrie sont nombreux à réclamer des travaux de mise aux normes; et le président de la république a annoncé l’ouverture d’un musée Notre Dame, d’une maison du dessin de la presse ou d’une maison des mondes africains. Son entourage indique que le ministère travaille à faire émerger «un nouveau modèle patrimonial pour sauver des édifices religieux en péril». Quant à la ministre, elle a indiqué sur X qu’elle échangerait «dès cette semaine, avec les acteurs culturels afin d'établir une feuille de route ambitieuse pour la Culture».