«Les gens se jettent dessus» : les produits dérivés à l’effigie du pape François ont la cote depuis son décès

C’est une petite pièce en argent d’un diamètre de 30 millimètres de diamètres et d’un poids de 9,5 grammes. Côté face, le visage du pape François, gravé de profil, est surmonté de son nom en latin, «FRANCISCUS», et de son titre, «PONT. MAXIMUS» pour pontifex maximus (grand pontife). Côté pile, une représentation aérienne de la basilique Saint-Pierre du Vatican et l’année 2013 inscrite en chiffres romains. Cette pièce, Anna* l’a mise en ligne mardi 22 avril au prix de 40 euros sur la plateforme de petites annonces Leboncoin, au lendemain du décès du pape François. Elle est vendue avec son écrin noir et son certificat de garantie. «J’ai récupéré ce type de pièces lors du décès de ma belle-mère, mais ça ne m’intéresse pas du tout et je ne savais pas quoi en faire, raconte Anna. J’ai entendu à la radio que des personnes souhaitaient acheter des souvenirs du pape, j’ai regardé le prix d’achat sur internet et j’ai proposé la mienne à -25%, ce qui me paraît correct

Comme une multitude d’autres objets, cette pièce en argent à l’effigie du pape François a été mise en vente dans la foulée de son décès sur Leboncoin. DR

Comme Anna, de nombreux particuliers ont saisi l’opportunité du décès de Jorge Mario Bergoglio lundi 21 avril, à l’âge de 88 ans, pour revendre sur la toile des petits objets à son effigie, des médailles aux rosaires en passant par des figurines, des billets, des livres ou encore des bustes. Certains assument de faire grimper les prix, comme Ulysse, qui vend jusqu’à 100 euros un autographe du pape acheté pour une bouchée de pain en brocante. «Il faut que j’y gagne un petit peu quand même», justifie-t-il au micro de Franceinfo. Ce qui a le don de scandaliser le porte-parole d’un diocèse français contacté par nos soins. «Le pape aimait donner des chapelets aux enfants. Je trouve ça honteux que des gens les revendent sur internet», grince-t-il.

«J’ai fait +40% sur certains articles»

D’autres revendeurs, comme Gilles*, jurent qu’ils sont animés de bonnes intentions. Mettre son annonce en ligne dans la foulée du décès du pape, c’était «se débarrasser» des médailles dont il ne voulait plus, mais aussi et surtout «satisfaire quelqu’un». Car nombreux sont les fidèles, à travers le monde, à vouloir garder un petit souvenir des douze années de pontificat de François. Il n’y avait qu’à voir, dans les heures suivant l’annonce de son décès, fervents catholiques et voyageurs d’un jour se ruer sur les échoppes touristiques de la Via della Conciliazione, l’artère qui délimite la frontière entre Rome et la Cité du Vatican. On s’y arrache encore des magnets, des assiettes, des carnets, des stylos et bien sûr des t-shirts floqués avec le visage du souverain pontife argentin. Autant de produits dérivés qu’il convient d’écouler avant que soit élu son successeur.

«En Italie, en Espagne, en Allemagne, aux Pays-Bas et même en Belgique, j’ai fait +40% de ventes sur certains articles depuis lundi, glisse le propriétaire du site marchand La Boutique des Chrétiens. On a vendu des petites icônes, des bougies, des lumignons.» Pas plus d’engouement que cela en France, en revanche, où le pic a été faible, probablement parce que «le pape n’y était pas très apprécié». Même son de cloche du côté de la boutique Objets de Piété Au Cœur Immaculé de Marie, dans le 2e arrondissement de Paris, où il ne s’est vendu qu’«une ou deux cartes médailles» depuis lundi. «Après l’enterrement [prévu samedi, NDLR], il y aura peut-être plus de monde», veut-on croire.

Ruée sur l’œuvre littéraire du pape

Les Français semblent en revanche s’intéresser de près aux œuvres littéraires du pape François. La librairie La Procure, sise rue de Mézières dans le 9e arrondissement de Paris, affirme que les lecteurs se sont précipités sur les textes phares de Jorge Mario Bergoglio qu’elle a disposées sur plusieurs petits présentoirs, et qui témoignent de sa «grande sagesse». Les clients recherchent en particulier «Louée soit la lecture», «Le nom de Dieu est Miséricorde», mais aussi «Des pauvres au pape, du pape au monde», un recueil de dialogues entre le pontife et ses fidèles les plus démunis. Sans compter sa première exhortation apostolique, «Evangelii Gaudium», ou encore sa quatrième et dernière encyclique, «Dilexit Nos» («Il nous a aimés» en latin), qui porte sur le Sacré-Cœur de Jésus.

Se souvenir du pape François passe aussi par les photos. L’album «Papa Francescu in Corsica», qui réunit 52 clichés de la visite du pape en Corse en décembre dernier, connaît un regain de succès depuis lundi parmi les fidèles de l’île de Beauté. Il est édité par l’Église de Corse depuis le mois de mars et coûte 40 euros. «Il y avait eu du monde au moment de la promotion en mars, mais depuis le décès, il y a un pic de ventes. Les gens se jettent dessus», rapporte François-Antoine Isoni, représentant de l’évêché d’Ajaccio. «La venue du pape, c’était historique, on l’a accueilli comme une famille. C’est un souvenir qui restera, poursuit-il. Certains n’avaient pas eu le temps de prendre cet album avant. Là, ils en achètent un, deux, parfois quatre ou cinq exemplaires pour les amis et la famille.» François-Antoine Isoni rappelle toutefois que le diocèse n’est pas dans une logique de rentabilité, et que les fonds récoltés sont dédiés à la formation des jeunes séminaristes. Et de conclure : «On a besoin de séminaristes, donc c’est une bonne chose.»

*Le prénom a été modifié.