Qui l’aura récemment applaudie dans Onéguine, le ballet de John Cranko au palais Garnier, aura succombé dans un premier temps à sa grâce sensible et délicate, transmuée ensuite en une volonté farouche, presque animale. Hannah O’Neill danse sur un nuage, comme sur un volcan, avec la même poésie. Elle est née à Tokyo d’une mère japonaise passionnée de danse et d’un père néo-zélandais, joueur de rugby international.
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Petite boule d’énergie, elle commence l’apprentissage de la danse à 3 ans au Japon, étudie au Kishibe Ballet Studio, à Tokyo, avant de poursuivre à l’Australian Ballet School, à Melbourne, à la faveur du déménagement de ses parents. À 18 ans, la voici à Paris, engagée comme surnuméraire par le ballet de l’Opéra. Fait notable: elle est l’une des rares danseuses recrutées sans passer par l’école de danse. Après les premières semaines d’excitation, la situation devient difficile: langue, culture, continent, tout lui est étranger. Mais elle s’accroche. «J’aime le challenge.»
Tout s’enchaîne alors assez vite. Elle est promue coryphée en 2013, sujet en 2015 - année où elle reçoit le prix Arop de la danse -, première danseuse quelques mois plus tard, raflant aussi le prix Benois de la danse. Ensuite, patience. «Chacun a un parcours différent», lui répétait son professeur de danse. «J’ai compris ce que signifiait le travail. Les exercices au studio, tous les jours, recommencer encore et encore sans jamais regarder en arrière, toute cette recherche autour de sa propre singularité, de l’excellence, savoir constamment se renouveler, tout cela me fait vibrer.»
Et puis, le 2 mars 2023, à l’issue de la représentation de Ballet impérial de George Balanchine, elle est nommée danseuse étoile. Un parcours sans faute pour celle qui s’exprime dans un français parfait et passe avec la même aisance de la scène de l’Opéra aux gradins du Stade de France pour applaudir les All Black. Passion rugby: bon sang ne saurait mentir.
L’endroit où vous vous sentez le mieux au monde?
Impossible d’en choisir un seul, j’ai besoin du mélange de mes trois cultures: la magnifique nature de la Nouvelle-Zélande, la politesse du Japon et l’effervescence culturelle de la France.
Le bâtiment architectural que vous préférez?
Pas très original de ma part, mais le palais Garnier m’impressionne chaque jour.
Votre hôtel préféré au monde?
The Okura à Tokyo. J’adore traverser son lobby emblématique.
Un lieu culturel source d’inspiration renouvelée?
J’aime beaucoup La Ménagerie de verre à Paris (11e). Entre studio de danse et belle programmation de spectacles, j’y passe toujours un très bon moment!
Le ballet pour lequel vous avez le plus de tendresse?
Giselle, le plus beau ballet.
L’œuvre artistique qui pourrait vous faire pleurer?
Le film Happy Together de Wong Kar-Wai. Une histoire d’amour déchirante, mais tellement poétique.
Une icône de la danse qui vous inspire?
Rudolf Noureev. Je pourrais regarder sans fin des images de lui. Sa beauté, bien sûr, mais il est tellement fascinant!
Une mise en scène qui vous fait chavirer?
The Dante Project de Wayne McGregor avec la scénographie de l’artiste Tacita Dean.
Vos designers de mode préférés?
Thierry Mugler. J’aime sa théâtralité et ses vêtements, presque des costumes.
Votre accessoire préféré chez Chanel, maison dont vous êtes l’amie et qui est grand mécène de l’Opéra de Paris?
Le classique 11.12.