La Birmanie toujours en proie au chaos une semaine après le séisme
Il est toujours difficile de savoir où en est la Birmanie vendredi 4 avril, soit une semaine jour pour jour après le séisme qui a fait plus de 3 000 morts et 4 500 blessés, selon un dernier bilan. Dans les zones touchées, les réseaux de téléphone ne fonctionnent pas ou mal et la circulation est toujours chaotique. Les routes se sont soulevées ou crevassées. Il faut 12 heures pour aller de la capitale jusqu'à Mandalay contre six en temps normal.
Une Birmane qui travaille pour Care, une ONG spécialisée dans l'aide d'urgence, a envoyé un message à ses collègues. Elle ne veut pas donner son nom pour des raisons de sécurité mais on comprend qu'elle est très affectée. "Je revis sans arrêt cette expérience, le jour comme la nuit, confie-t-elle.
"Je ne me sens pas en sécurité à Mandalay, parce qu'il y a toujours des répliques."
Une Birmane de l'ONG Careà franceinfo
Elle dit vouloir déménager plus à l'Est, dans une ville épargnée par les destructions. Le jour où la terre a tremblé, elle était au troisième étage de sa maison. "J'essaie encore de me remettre de mes chocs mentaux et physiques, poursuit l'humanitaire. Personne n'était préparé". Elle constate les difficultés des secours, alors que des survivants peuvent encore être retrouvés sous les décombres. "Les gens ont besoin de moyens de recherche et de sauvetage, mais nous avons des capacités très limitées. La Birmanie est un pays pauvre. Tous ceux qui nous tendent la main seront très utiles", appelle-t-elle.
Sans eau potable par 40 degrés
L'armée est quasiment invisible, les sinistrés se réfugient dans des villages de tentes où ils doivent vivre sans eau potable, sans électricité par 40 degrés. Cette autre employée de Care a pu visiter un camp de fortune dressé dans un monastère. Elle décrit la difficulté de récolter des informations. "Le campement était complètement éparpillé et désorganisé. On a essayé de collecter des données pour pouvoir distribuer de l'argent mais ils n'ont aucune expérience de la gestion des camps et des catastrophes. C'est vraiment très difficile de s'organiser. On a quand même identifié 70 foyers à qui on a donné 150 euros chacun pour un mois. Et on essaie aussi d'obtenir plus d'informations pour mettre en place d'autres distributions".
Si la junte a facilement ouvert ses portes aux pays de la région et à son allié russe, les organisations humanitaires internationales, elles, se débattent dans les méandres de la bureaucratie birmane. Elles ont demandé aux autorités d'accélérer les procédures pour pouvoir entrer avec leur matériel faute de quoi l'eau et la nourriture pourraient bientôt manquer. Pour l'instant ce sont surtout des équipes de bénévoles en provenance de différents endroits de Birmanie qui se déplacent avec des camions chargés d'eau, d'huile, de riz et d'autres produits de base. Face au manque d'efficacité des autorités, la société civile s'est massivement mobilisée.
Sur le plan militaire, après les groupes rebelles, la junte a annoncé à son tour mercredi un cessez-le-feu jusqu'au 22 avril. Le secrétaire général de l'ONU a salué cette trêve temporaire, appelant à ce qu'elle conduise "rapidement" à un "dialogue politique" entre le régime et ses opposants. En mal de reconnaissance, affaiblis par des sanctions à la suite de leur coup d'État il y a 4 ans, les militaires pourraient faire un geste pour tenter de retrouver du crédit. Le chef de la junte est d'ailleurs à Bangkok pour un sommet régional, déplacement qui ne fait pas consensus : sur un pont à proximité du Shangri-La Bangkok, un hôtel de luxe où il a dormi et profité d'un dîner de gala, des manifestants ont accroché une bannière : "Nous n'accueillons pas le meurtrier Min Aung Hlaing".