Auchan et Michelin répondent à Michel Barnier

Voilà de quoi envenimer un peu plus les relations difficiles entre les entreprises et le monde politique. Auchan et Michelin, qui ont annoncé deux plans sociaux difficiles mardi matin, n'ont pas attendu longtemps pour réagir aux propos du premier Ministre tenus le même jour. Devant l'Assemblée nationale, Michel Barnier est monté au créneau, demandant vouloir «savoir» ce qu’ils avaient fait «de l'argent public qu'on leur a donné».

Le premier ministre avait été interpellé par André Chassaigne, député du Parti communiste français (PCF) qui le questionnait notamment l'utilisation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) par les deux groupes et qui accusait, comme à l'habitude, les différents gouvernements sous Emmanuel Macron de faire « des cadeaux phénoménaux » aux entreprises.

« La réduction de charges annuelle de 83 millions accordée au titre du CICE entre les années 2013 et 2018 a été intégralement utilisée pour les objectifs ciblés par ce dispositif», a rétorqué Auchan, citant la redistribution «du pouvoir d'achat à ses collaborateurs via la prime de progrès et la participation.» Ou encore, la restauration de «la compétitivité de l'entreprise» et le déploiement des «technologies innovantes». 

2389 suppressions d'emplois

Mis en place en 2013 sous François Hollande pour alléger le coût du travail des entreprises - élevé en France par rapport aux autres pays européens- et doper leur compétitivité, le CICE a été transformé en baisse pérenne des cotisations patronales en 2019 comme promis par Emmanuel Macron durant la campagne pour l'élection présidentielle de 2017. Il est depuis régulièrement critiqué à gauche de l'échiquier politique.

L'enseigne à l'oiseau rouge a également tenu à préciser qu'au «seul titre de 2023, l'entreprise a payé 258 millions d'impôts et taxes (hors taxes collectées : TVA, taxes sur les alcools, TICPE) et 607 millions d'euros de charges sociales pour la part patronale, contribuant ainsi au fonctionnement public.» 

En grandes difficultés, le distributeur alimentaire nordiste de la galaxie Mulliez vient tout juste d'annoncer un plan choc pour tenter de sortir de l'ornière. Le groupe prévoit 2389 suppressions d'emplois sur quelque 54.000 salariés, soit près de 5% de ses effectifs en France, notamment la fermeture de dix magasins dont trois hypermarchés.

1,2 milliard d’euros d’investissements annuels en R&D par Michelin

Même réaction chez Michelin, fleuron industriel français du pneu, qui a indiqué, le même jour, devoir fermer deux usines à Cholet (Maine-et-Loire) et à Vannes (Morbihan) qui emploient 1254 personnes. Rappelant qu’il ne bénéficiait plus du CICE, le groupe a fait savoir qu'il avait bénéficié de 42 millions d'euros en 2023 au titre du crédit impôt recherche (CIR), «principale aide publique.». Et d’insister: «ce chiffre est à mettre en regard des investissements réalisés par Michelin en R&D à hauteur de 1,2 milliard d'euros chaque année.». 

En plein débat houleux sur le projet budget 2025 au Parlement à la recherche de dizaines de milliards d'euros d'économies, Michelin a indiqué que le CIR était «très important ». Cet avantage fiscal permet «de rendre les chercheurs compétitifs et de consolider le centre mondial de R&D du Groupe en France, a précisé le groupe. Ce sont plus de 3000 chercheurs qui sont basés au centre de Ladoux à Clermont-Ferrand.»