Cérémonie d’ouverture de JO : un scénario «qui déjoue les stéréotypes nationaux» signé Leïla Slimani et Patrick Boucheron

La romancière Leïla Slimani, l'historien Patrick Boucheron, la scénariste Fanny Herrero (Dix pour cent) et le dramaturge Damien Gabriac ont participé à l'écriture de la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de Paris, spectacle qui sera le «contraire d'une histoire héroïsée», déjouant avec «humour» les «clichés». Dans une interview au Monde mardi, la prix Goncourt 2016 et l'historien du Collège de France racontent comment ils ont imaginé, au sein de l'équipe du directeur artistique Thomas Jolly, ce spectacle suivi par 300.000 spectateurs et des centaines de millions de téléspectateurs. «J'avais l'idée d'un immense spectacle mais il me manquait un récit pour m'adresser au monde entier», explique Thomas Jolly, qui dit avoir disposé, avec ces quatre auteurs, de «l'équipe idéale».

La cérémonie, le 26 juillet, casse les codes, se tenant non pas dans un stade mais sur la Seine et autour des monuments emblématiques de la capitale. Sur les berges et les ponts, quelque trois mille danseurs et comédiens proposeront douze tableaux artistiques, tandis que les délégations nationales défileront sur des bateaux. Et, petite surprise, la cérémonie se déroulera aussi «dans le ciel», indique Thomas Jolly.

Inspiré par le défilé Jean-Paul Goude en 1989

Patrick Boucheron dit s'être inspiré de «la cérémonie imaginée par Jean-Paul Goude pour le Bicentenaire de la Révolution française, en 1989», qui a marqué l'histoire du spectacle vivant. «Le défilé déjouait les stéréotypes nationaux et ne craignait pas de prôner le métissage planétaire avec un optimisme que nous avons aujourd'hui perdu», estime-t-il.

Selon lui, Paris 2024 sera l'inverse de la cérémonie des Jeux de Pékin en 2008, qui était «une ode à la grandeur et une manifestation de force». L'ouverture des JO doit «parler du monde à la France et parler de la France au monde», ce sera le «contraire d'une histoire virile, héroïsée», avec pour valeur centrale la France, «promesse de liberté».

Le 14 juillet 1989, quelques jours après la répression de la place Tiananmen, le défilé célébrant la Révolution française avait rendu hommage aux Chinois manifestants contre le régime de Pékin. GERARD FOUET / AFP

Leïla Slimani évoque un «récit très généreux», avec «de la joie, de l'émulation, du mouvement, de l'excitation et de la pétillance, et pas seulement ces fameuses valeurs philosophiques traditionnelles que la France exhibe volontiers avec parfois trop d'assurance. (...) Nous nous jouons de l'image que les Français peuvent avoir dans le monde (...). Il y a beaucoup d'humour (...) dans notre spectacle», assure la romancière.

Fanny Herrero indique avoir «veillé aux enchaînements, aux registres, aux variations d'émotions». Interrogé sur la série populaire «Emily in Paris», Thomas Jolly cite aussi le film Le Fabuleux destin d'Amélie Poulain et dit avoir voulu «jouer avec les clichés (...) sans s'en moquer».