Une Coupe du monde 2034 en Arabie saoudite déjà sous le feu des critiques
Douze ans après le Qatar, la Coupe du monde repart dans le Golfe persique. Un Congrès virtuel de la Fifa a entériné mercredi 11 décembre le choix de l'Arabie saoudite pour l'édition 2034 de son tournoi phare. Un vote sans suspense tant le royaume saoudien a bénéficié d'une procédure express sur mesure malgré les interrogations suscitées par son choix.
En effet, la Fifa a joué les entremetteurs de luxe pour concocter une édition 2030, celle du centenaire de la compétition, de la démesure : elle sera organisée par le trio Espagne-Portugal-Maroc mais avec trois matches en Amérique du Sud. Une Coupe du monde de la démesure dans six pays et sur trois continents, qui ouvrait grand la porte aux Saoudiens, selon le principe de rotation continentale.
La Fifa a ainsi limité aux confédérations asiatique et océanique son appel à candidatures pour l'édition 2034, menée tambour battant en un petit mois à l'automne 2023. Et l'Arabie Saoudite, superpuissance en gestation du sport mondial – de la F1 aux futurs JO de l'e-sport, en passant par les Jeux asiatiques d'hiver 2029 – s'est retrouvée seule candidate après le renoncement de l'Australie et de l'Indonésie, et la mise en sommeil des ambitions footballistiques de la Chine
Le royaume ultraconservateur, lancé dans une stratégie de diversification économique et d'amélioration de son image, ne dispose pour l'heure que de deux des 14 stades d'au moins 40 000 places requis.
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Au-delà du défi logistique, l'été brûlant pourrait imposer un déplacement de la compétition en hiver ou en fin d'automne, comme lors du Mondial 2022 au Qatar, mais il faudra composer avec le ramadan, attendu en décembre.
Surtout, la formule tricontinentale de 2030 combinée à la désignation programmée de l'Arabie Saoudite a été accueillies par un concert de critiques : Amnesty International et l'organisation Sports and Rights Alliance (SRA) ont même appelé le mois dernier la Fifa à "interrompre le processus de candidature".
"Une véritable imposture"
"Si la Coupe du monde est devenue si lourde dans sa conception que la Fifa n'a d'autre choix qu'entre l'Arabie saoudite et l'organisation d'un tournoi dans six pays, alors le modèle doit être reconsidéré", a de son côté estimé l'association Football Supporters Europe (FSE).
Pour 2030, FSE déplore "les déplacements aériens inutiles" des équipes, médias et supporters, à l'encontre des engagements environnementaux de l'organisation, même si la Fifa souligne de son côté que 101 des 104 rencontres se dérouleront "dans un ensemble de pays voisins".
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Mais c'est surtout le "tapis rouge déroulé pour 2034 à un hôte au bilan épouvantable en terme de droits humains" que relève l'organisation de supporters, alors que les ONG pointent plusieurs risques, notamment l'exploitation des travailleurs migrants, qui vont être mobilisés en masse pour mettre à niveau les infrastructures, et les discriminations que pourraient subir les supportrices et les visiteurs étrangers LGBT+.
"On a beaucoup alerté la Fifa en disant que cette candidature était une véritable imposture", dénonce Anne Savinel-Barras, présidente d’Amnesty International France, dans La Croix. L’Arabie saoudite étouffe la dissidence, broie le droit des femmes et des minorités, on le sait. Les supporteurs pourraient être victimes de discrimination, des résidents seront expulsés de force, des travailleurs migrants seront exploités."
Dans son rapport d'évaluation, la Fifa estime que les engagements saoudiens en matière de droits humains supposeront "un effort significatif en temps et en énergie" d'ici 2034, mais voit "une probabilité non négligeable que la compétition serve de catalyseur pour les réformes en cours et à venir".
Avec AFP