Amnesty International refuse de soutenir Boualem Sansal, faute de preuves de sa détention arbitraire

Serait-il plus simple de s’informer à Gaza, en pleine guerre entre Israël et le Hamas (qu’au passage Amnesty International refuse de qualifier de mouvement terroriste, même s’agissant de sa branche militaire) qu’en Algérie ? L’ONG a en effet refusé de condamner officiellement la détention de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal par la justice algérienne, faute de disposer d’éléments d’information suffisants, comme l’avance Amnesty International sur X (Twitter) via le compte de son antenne française. La même ONG vient en revanche de publier un rapport attestant l’existence d’un «génocide» à Gaza.

À un internaute qui interpellait en effet l’ONG sur l’absence de toute condamnation de cette détention, jugée arbitraire par de nombreux observateurs français et «inquiétante» par l’Élysée, le compte Amnesty International France a en effet répondu que l’ONG travaille «à obtenir des informations quant à la situation de Boualem Sansal»

Et si Amnesty International reconnaît que «les informations selon lesquelles il serait détenu uniquement en lien avec l’exercice de son droit à la liberté d’expression sont très préoccupantes», l’ONG précise qu’elle n’a «malheureusement, pour l’heure [...] pas encore été en mesure de vérifier de façon indépendante les éléments relatifs à l’arrestation de l’écrivain franco-algérien». Et se contente donc d’appeler «les autorités algériennes à indiquer clairement les raisons de sa détention et à l’inculper rapidement d’une infraction légitime reconnue par le droit international ou bien à le libérer immédiatement».

Il est vrai que l’État algérien n’a certes pas publié de communiqué revendiquant officiellement l’arrestation arbitraire de l’écrivain, au seul motif que ses écrits heurtent la sensibilité du régime. En l’absence de cette précieuse clarification, Amnesty International France disposait tout de même de sérieux indices pour discerner si la détention de Boualem Sansal relève d’une «infraction légitime reconnue par le droit international».

Accusations de «révisionnisme»

L’agence de presse publique algérienne, Algérie Presse Service, a confirmé en effet le 22 novembre l’arrestation de Boualem Sansal «en plein délire révisionniste» avant de lui reprocher plus bas «sa tentative de nier l’existence même de la Nation algérienne». Sans faire mention d’aucune autre forme d’infraction qu’aurait commise l’écrivain, auquel tout au plus APS se contente de reprocher de vieilles accusations de plagiat, sans faire le lien avec son arrestation. 

L’avocat de Boualem Sansal a, depuis, confirmé que son client est en détention provisoire car il est poursuivi sur le fondement de l’article 87 bis du Code pénal algérien pour, entre autres, « atteinte à l’unité nationale et à l’intégrité territoriale du pays » et « complot contre la sûreté de l’État ».

 

 

Le seul lien fait entre ces accusations et l’écrivain repose seulement sur des propos, écrits ou oraux, de Boualeam Sansal. Ainsi le média TSA écrivait le 27 novembre : «Début octobre dernier, l’écrivain avait tenu, dans le média français d’extrême-droite Frontières, des propos très graves sur l’Algérie, son histoire et ses frontières. Il avait notamment soutenu que les frontières actuelles du pays ont été tracées par le colonialisme français qui a, selon lui, offert à l’Algérie toute ’la partie Est du Maroc’.»

 

Ni l’absence de communication du régime algérien ni le silence du parquet d’Alger ne suffisent donc à dissimuler la seule conclusion qui s’impose : c’est bien pour l’exercice de sa liberté d’expression que Boualem Sansal a été interpellé et placé en détention.