«État impuissant», «camouflet» : la droite déplore la censure de l’allongement de la rétention des étrangers

«État impuissant», «camouflet» : la droite déplore la censure de l’allongement de la rétention des étrangers

Le Conseil constitutionnel censure l'allongement de la rétention des étrangers «présentant de forts risques de récidive»

Le Conseil constitutionnel a déclaré non conformes, le 7 août, certaines dispositions de la loi visant à prolonger la rétention des personnes condamnées pour faits graves, notamment des étrangers. Si la gauche jubile, la droite dénonce un risque sécuritaire et une politisation de l’institution.

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C’est un revers pour Bruno Retailleau. Ce jeudi, les Sages ont censuré en partie la proposition de loi, défendue par le ministre de l’Intérieur, visant à faciliter le maintien en rétention des personnes condamnées pour des faits graves et présentant de forts risques de récidive. Les dispositions concernées prévoyaient de prolonger la rétention des étrangers dans une telle situation à 180, voire 210 jours, contre 90 dans le régime de droit commun actuel. Le Conseil constitutionnel s’est justifié en citant l’article 66 de la Constitution, qui «dispose que “nul ne peut être arbitrairement détenu”, protège la liberté individuelle et fait de l’autorité judiciaire sa gardienne».

Un verdict «dangereux»

La décision, rendue en même temps que celles sur les lois Duplomb et PLM, n’a pas échappé au radar d’un certain nombre de personnalités politiques. À droite, sans surprise, les réactions se montrent critiques. «Le Conseil constitutionnel fait très fort aujourd’hui. [...] Il ne protège plus les Français, il se met au service de revendications ultra-minoritaires. Quand reprendrons-nous enfin la main ?» s’est offusqué Laurent Wauquiez, président des Républicains à l’Assemblée nationale, sur X.

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Même son de cloche chez Christian Estrosi, ex-LR membre d’Horizons. «Une fois encore, la volonté du peuple français est bafouée et ignorée. À force d’interdire toute réponse à l’immigration, on fabrique l’État impuissant et on nourrit la colère des Français. Et c’est extrêmement dangereux», a mis en garde le maire de Nice.

Si Marine Le Pen a souligné la menace sécuritaire, elle en a aussi profité pour rejeter la faute sur les pays étrangers. «La durée de rétention administrative des étrangers en situation irrégulière, jugés dangereux, ne règle pas le problème des États récalcitrants à délivrer des laissez-passer consulaires pour récupérer leurs ressortissants indésirables», a assené la présidente du groupe Rassemblement national à l’Assemblée. Elle exhorte ainsi le gouvernement à prendre, contre ces États, «des mesures de rétorsion politiques, économiques et diplomatiques».

La balle est donc désormais dans le camp du gouvernement. Il est plus que temps de sortir des postures pour contraindre ces pays à se plier au droit international par des sanctions et des mesures de rétorsion politiques, économiques et diplomatiques.

Pour l’eurodéputé du RN Thierry Mariani, les Sages se compromettent en faisant de la politique plutôt que du droit. «Suis-je seul à avoir l’impression que le Conseil Constitutionnel est devenu le garant d’un conformisme moral issu d’une "gôche" rejetée plutôt que le protecteur de la Constitution ?» a-t-il taclé. De son côté, l’ex-député et avocat Gilbert Collard s’est exclamé : «C’est le conseil du désarmement national !»

Un «camouflet» pour la droite

Au contraire, la gauche, elle, a salué la décision des Sages. «Le Conseil constitutionnel met un frein à la dérive autoritaire : il censure la rétention de 90 à 210 jours voulue par l’axe Macron–Le Pen–Retailleau. Liberté 1. Xénophobie 0», s’est félicité Aly Diouara, député insoumis de Seine-Saint-Denis. Tout comme sa collègue du Val-d’Oise Gabrielle Cathala, qui célèbre le «deuxième camouflet de la journée pour l’arc Macron - Le Pen», en référence à la censure de la loi Duplomb.

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Bruno Retailleau n’a, pour le moment, pas réagi. La proposition de loi, déposée en mars par la sénatrice LR du Val-d’Oise Jacqueline Eustache-Brinio, a été définitivement adoptée par le Sénat le 9 juillet. Les Sages ont cependant été saisis, quelques jours plus tard, par une soixantaine de députés. Le texte représente un enjeu sécuritaire cher aux yeux de la droite. Il trouve son origine dans le meurtre de Philippine, une étudiante de 19 ans, affaire très médiatisée qui a ému l’opinion publique en septembre 2024. Un Marocain, violeur récidiviste en situation irrégulière et sous obligation de quitter le territoire français, a reconnu en décembre avoir tué la jeune femme.