Gaza, la famine et l'"éducide"

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A la Une de la presse, le chaos provoqué par la première distribution d’aide alimentaire gérée par Israël à Gaza.

Des milliers de personnes, affamées, se ruant sur des cartons de nourriture, dispersées par des tirs de sommation israéliens. La Repubblica évoque le «désespoir» des Gazaouis, après 11 semaines de blocus. Dans un entretien accordé au quotidien italien, le directeur du Programme alimentaire mondial pour la Palestine prévient que «Gaza a besoin de plus de nourriture, faute de quoi des gens désespérés prendront les armes pour l’obtenir».

«600 jours après les attaques du 7 octobre, la campagne israélienne a permis la destruction des infrastructures du Hamas et la libération de 148 otages, mais une vraie victoire passe par un retrait complet de Gaza, pour que les derniers otages soient libérés à leur tour et pour que la nation puisse cicatriser», écrit ce matin le Jerusalem Post, quotidien conservateur, sur une Une blanche, où apparaissent les noms de des quelque 1200 victimes israéliennes du 7-Octobre. Dans une tribune publiée par le quotidien Haaretz, journal de gauche, l’ancien Premier ministre israélien Ehud Olmert affirme que «les récentes opérations dans la bande de Gaza n'ont rien à voir avec des objectifs de guerre légitimes», et qu’«il s'agit désormais d'une guerre politique privée» - celle de «la bande criminelle dirigée par Benyamin Netanyahou», qu’il accuse de «crimes de guerre».

La guerre à Gaza, qui divise chaque jour un peu plus, la société israélienne. Le Parisien/Aujourd’hui en France raconte un pays «déchiré», une population « déboussolée, tiraillée », et où « les positions se sont souvent radicalisées ». Ces lignes de fracture parcourent aussi les communautés juives en-dehors d’Israël, notamment en France, où Le Figaro fait état du dilemme, des hésitations et des doutes «des voix juives françaises»: «Comment critiquer un État en guerre sans nourrir l’antisémitisme ambiant? Peut-on aimer Israël sans approuver sa politique?».

L’esprit critique et le doute, dont la transmission est l’un des piliers de l’Université. Quand ce pilier s’effondre, que reste-t-il? Alors que le taux d’alphabétisation dans les territoires palestiniens figurait parmi les plus élevés au monde: 98%, en 2022, la guerre a porté «un coup fatal» au système éducatif de Gaza, selon Le Monde, qui revient en particulier sur l’effondrement de l’enseignement supérieur. Les 12 universités de l’enclave ont été détruites. D’après le journal, trois présidents d’université, des centaines de professeurs et des milliers d’étudiants ont été tués, tandis que les autres, soit près de 90 000 jeunes, ont vu leur parcours brutalement interrompu. Le journal raconte comment les étudiants doivent parfois parcourir des kilomètres à pied, sous les bombardements, pour trouver un cybercafé avec un Internet quasiment inexistant, et tenter de suivre des cours en ligne  dispensés grâce à des mouvements de solidarité à-travers le monde, et eux-mêmes confrontés à de nombreux obstacles – comme les pressions et les sanctions auxquelles s’exposent les enseignants et les étudiants mobilisés pour Gaza. Les dommages causés au système éducatif de Gaza sont tels que de nombreuses voix, comme celle du Conseil des droits de l’homme de l’ONU dénoncent un «scolasticide» ou «éducide», un terme apparu à l’époque de la première guerre de Gaza, en 2009, et dont le concept a été intégré dans la plainte de L’Afrique du Sud dans ses poursuites pour «génocide» devant la Cour pénale internationale.

Le défi de l’éducation, pendant et après la guerre, auquel est aussi confrontée la Syrie. L’envoyée spéciale du Figaro s’est rendue à Douma, au cœur de la Ghouta orientale. Dans cette grande banlieue de Damas, dévastée par le régime d’Assad avec le soutien de la Russie, des femmes se lancées dans la reconstruction des établissements scolaires sans attendre la levée des sanctions. Parmi elles, Hanadi Tanta explique que les nouvelles autorités sont «dépassées par d’autres dossiers», mais qu’il y a «urgence à faire de l’éducation une priorité si l’on ne veut pas que les jeunes sombrent dans la criminalité ou la radicalité». Victor Hugo, dans «Les Misérables», n’écrivait-il pas qu’il n'y a «ni mauvaises herbes ni mauvais hommes», seulement «de mauvais cultivateurs»?

En Russie, les élèves auront désormais accès à des manuels scolaires d’un genre nouveau. The Moscow Times, quotidien russe indépendant, rapporte qu’un fabricant de drones, la société Geoscan, dont la fille cadette du président Poutine est actionnaire, annonce la publication du premier manuel scolaire du pays sur l'utilisation de ces appareils. D’après le journal, ce manuel s’inscrit dans le programme fédéral de technologie, dont l’ambition est de former 1 million d'opérateurs de drones dans plus de 500 écoles et 30 universités d'ici 2030. Le régime russe, qui n’a pas oublié les enfants qui ne sont pas encore en âge d’aller à l’école. The Times, le quotidien britannique, rapporte Vladimir Soloviev, l’un des visages les plus connus de la propagande russe et visé d’ailleurs à ce titre par sanctions de l'Union européenne et du Royaume-Uni, pour avoir contribué à la désinformation sur l’Ukraine,  «s'apprête à lancer une émission sur la géopolitique destinée aux enfants d'âge préscolaire».

Dans un registre plus sympathique un mot, pour terminer, de l’initiative de nos confrères de la BBC, qui lance des cours en ligne pour apprendre à écrire des romans policiers. Et qui de mieux que la reine du crime pour assurer cette masterclass? Je parle bien sûr d'Agatha Christie. Hélas, la mère d’Hercule Poirot est morte depuis près d’un demi-siècle maintenant. Qu’à cela ne tienne, les services numériques de la BBC ont fait travailler leurs petites cellules grises, et ressuscité la célèbre romancière grâce à l’intelligence artificielle. Le résultat est saisissant. A retrouver sur le site de France Info.

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