Chaque jour, Paul (Jean Dujardin) nage pour se maintenir en forme. Ce quinquagénaire chef d’entreprise en construction navale traverse soudain un mystérieux cercle de nuages concentriques, étrange phénomène météorologique surgi de nulle part. De retour chez lui, cet époux fidèle, père d’une petite fille, reprend le cours de sa vie.
Mais rapidement, il constate qu’il a perdu quelques centimètres. Les médecins qu’il consulte avec sa femme Élise (Marie-Josée Croze) lui répondent tous la même chose : « À ce stade, je n’ai aucune explication à part cette diminution homogène comparative proportionnée. C’est comme si vous étiez en train de rétrécir… »
Passer la publicitéVoyage angoissant
Passé l’incompréhension et la colère, Paul s’adapte à sa condition, établissant ses nouveaux quartiers dans la maison de poupée de sa fille, avant de se retrouver prisonnier dans la cave de son habitation, devenue aussi vaste que les canyons du Colorado. Un voyage angoissant se profile alors : survivre dans un univers en perpétuel agrandissement. En jouant sur l’effet de réalisme, le film instille un trouble sidérant à chaque plan.
À lire aussi Jean Dujardin: «C’est très amusant à faire, le Sarkozy»
Quelle drôle d’idée de réadapter en France ce vieux classique du cinéma fantastique américain réalisé en 1957 en noir et blanc par Jack Arnold, d’après le roman de Richard Matheson The Shrinking Man. Depuis presque soixante-dix ans, ce concept a plutôt évolué vers la comédie ou les super-héros à Hollywood, comme dans Chérie, j’ai rétréci les gosses ou Ant-Man. C’est tout à l’honneur de Jean Dujardin et Jan Kounen (qui se retrouvent dix-huit ans après 99 francs) de s’être battus pour obtenir les droits de cette attachante série B devenue un joyau de la science-fiction.
Ce qui est banal devient périlleux
La remise à jour audacieuse du roman de Matheson impressionne surtout par sa modernité. Le rôle du héros ordinaire pris dans la spirale d’une miniaturisation extraordinaire fournit une trame narrative implacable. Tout ce qui est banal devient périlleux. Le chat, la souris, le poisson rouge dans son bocal, une mouche ou un papillon se transforment en monstres géants. Lorsque Dujardin affronte une araignée, on croirait voir Kirk Douglas face à un calamar géant dans Vingt Mille Lieues sous les mers de Richard Fleischer…
Grâce à la musique ample d’Alexandre Desplat, ainsi qu’à une bande-son bien anxiogène, le film se mue en fable fantastique au pouvoir philosophique resté intact. Mais c’est surtout Jean Dujardin qui emporte le morceau par son impeccable interprétation. Portant sur ses épaules le poids du film, il joue tout en justesse et en humanité ce Robinson Crusoé de l’infiniment petit.
Sa prestation, dont la physicalité rappelle celle d’un George Valentin dans The Artist, reste à l’équilibre entre la peur, la dérision, l’humour, le courage et l’acceptation d’un inéluctable destin. Dujardin incarne à lui seul l’impuissance d’un être humain fragile qui traverse l’existence, non plus sur un plan temporel, mais sur une nouvelle échelle, celle de la grandeur. Plus il diminue, plus le héros va embrasser la vie dans toutes les acceptions du terme. Comme s’il s’agissait d’une renaissance. Cela ne va pas hélas sans une certaine mélancolie…