« Ce que disait Françoise Giroud est toujours vrai : la femme Saint Laurent est louche à midi, comtesse à minuit »

« Ce que disait Françoise Giroud est toujours vrai : la femme Saint Laurent est louche à midi, comtesse à minuit »

Défilé printemps-été 2026 Saint Laurent. Saint Laurent

Dans cette Fashion Week du renouvellement, Anthony Vaccarello fait figure de vétéran avec ses dix ans de règne dans la maison d’Yves Saint Laurent. Et pourtant, le mythe de cette belle de nuit, nue sous son trench au pied de la tour Eiffel, fonctionne toujours à merveille.

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On a beau être blasé par les célébrités en tout genre présentes à la Fashion Week, force est de reconnaître que le front row de Saint Laurent est toujours un panel parfait de jeunes premiers sexy (Conrad de L’Été où je suis devenue jolie), d’actrices cultes (Catherine Deneuve) et cool (Zoë Kravitz), d’ex-mannequins sans filtre (Kate Moss, Carla Bruni), et de superstars en retard (Madonna)… Une crowd qui participe évidemment au chic sulfureux de la griffe et fait sa différence. Tout comme le décor du défilé, place des fontaines du Trocadéro, avec vue imprenable sur la tour Eiffel : 14 000 hortensias qui, vus du ciel, forment le fameux logo de Cassandre, YSL. « Dans cette saison marquée par l’arrivée de nouveaux designers - ce que je trouve très bien -, je voulais rappeler que là, vous êtes chez Saint Laurent. Le Cassandre, c’est Saint Laurent », insiste Anthony Vaccarello, le designer dont c’est le 30défilé pour la maison - il les a comptés !

Comme son « maître » Yves, Vaccarello sait ainsi parfaitement vous vendre une beauté lisse en surface, perverse dans le fond. Ce dédale de fleurs lui a été inspiré, par exemple, par le « labyrinthe » des Tuileries, haut lieu de drague et de sexe homosexuel dans les années 1980 - que M. Saint Laurent, avec tout notre respect, a sans doute fréquenté. « Cette saison, je suis partie de la formule, toujours vraie, de Françoise Giroud : “La femme Saint Laurent est louche à midi, comtesse à minuit”, explique le directeur artistique belge en coulisses. Je trouvais drôle d’imaginer ce cruising (la recherche de sexe gay dans les lieux publics, en référence au film avec Al Pacino en 1980, NDLR) au féminin. J’imaginais Betty Catroux  qui peut être très dure et très louche aussi, tout en cuir à la Mapplethorpe mais bijoutée à la Saint Laurent avec des croix baroques»

Défilé printemps-été 2026 Saint Laurent. Gonzalo Fuentes / REUTERS
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Une Catroux qui, pour ses déjeuners en ville, porte une veste ultra-épaulée et une jupe droite en cuir noir à forte charge érotique mariées à une chemise en popeline rigide non moins fétichiste. Fin de journée, changement de registre, elle enfile sur sa peau nue un trench en nylon tellement fin qu’il se roule en boule dans la main. De cette même matière mouvante comme la soie, Vaccarello fait des robes esprit saharienne, des jupes et top lavallières, des imperméables dans des couleurs vibrantes façon vernis à ongles, bleu nuit, bourgogne, vert chartreuse, orange brûlé… À minuit, elle devient comtesse ou plutôt Reine Margot façon Adjani dans le film de Chéreau avec ses robes aux manches gonflées, taillées, drapées, volantées dans des mètres et des mètres de ce fameux nylon. C’est le souffle dramatique de l’héroïne mais aussi la violence de cette page de l’histoire de France qui a intéressé Anthony Vaccarello bien qu’il se garde de commenter l’actualité. « La mode est politique qu’on le veuille ou non. M. Saint Laurent a bien été le premier à proposer à ses clientes des pantalons, c’était un message politique»