TEMOIGNAGE. "Ils nous ont fait beaucoup de mal" : cette famille d'Ukrainiens "brisée" par trois ans de guerre raconte

À l'approche des trois ans du début de la guerre en Ukraine, le 24 février prochain, et en amont de la conférence pour la Sécurité de Munich vendredi, l’armée russe continue son avancée sur le terrain. Moscou a revendiqué, mardi, la prise d'un nouveau village dans la région ukrainienne de Donetsk. Les combats se sont aussi intensifiés vers Koupiansk, près de Kharkiv à l'est du pays, près de la frontière russe, où vit un couple, épuisé, fuyant les combats.

Toit, bétail, biens, quand la bombe a frappé leur maison, près de Koupiansk, Zoya et son mari ont tout perdu. Ivan, blessé à la jambe, en a même perdu la tête. Assis sur le petit lit de la minuscule chambre du centre de réfugiés qui les accueille, le vieil homme ne cesse de pleurer. "Nous avons une telle histoire, très dure, très douloureuse", confie Zoya.

Quand elle ferme les yeux, elle revoit le corps de ses voisins tué par la bombe et entend encore le hurlement de la mère d’un jeune homme décapité par l’explosion.

"L’Union européenne ne soutient pas beaucoup l’Ukraine. "

Ivan, habitant d'un village de l'est ukrainien

à franceinfo

Alors quand on parle de cessez-le-feu, la vieille dame le dit : "Nos projets ? Nous allons reconstruire. Là-bas, ce sont nos racines." "Mais si on rentre chez nous, je ne sais pas, reprend son mari en pleurant, car le toit est détruit, les vitres sont cassées, il n'y a plus rien." "On doit rentrer", insiste Zoya. "On doit rentrer, mais comment faire ? questionne Ivan. Parce qu’il n’y a pas assez d’aide en Ukraine, parce que Zelensky ne s’en sortira pas tout seul. Si tout le monde l’avait soutenue, peut-être qu’on aurait chassé Poutine depuis longtemps".

"Ils torturaient les gens"

Leurs petits-enfants, depuis, ont rejoint l’armée. "C’est ma fierté d’avoir élevé de tels petits enfants, souligne Zoya. Depuis tout petits, ils disaient 'mamie, on te protégera toujours'. L’aîné a 22 ans, le cadet 21, c’est l’âge d’aimer les filles mais mes petits-enfants sont des soldats de l’armée."

Six mois d’occupation russe ont traumatisé Ivan et Zoya. "Ils nous ont fait beaucoup de mal. Les familles ont été brisées. Dans notre famille, le neveu de mon mari a été torturé par ces monstres, raconte Zoya en soupirant. On l’a trouvé mort, torturé, couvert de ciment. Une balle dans la poitrine, une autre dans l’aine. Ses mains liées. C’est ça qu’on avait à Koupiansk, ils torturaient les gens."

L’armée russe est sur le point de reprendre Koupiansk. Zoya et Ivan ne retrouveront probablement jamais leur maison.