Trois ans de procédure pour faire annuler un PV : un automobiliste handicapé gagne son combat contre la bureaucratie

L’histoire d’Henri Communal illustre un dysfonctionnement du système parisien de stationnement pour les personnes en situation de handicap. Tout remonte au 26 décembre 2022, alors que le protagoniste se faisait un plaisir d’emmener ses enfants voir une pièce de théâtre, boulevard Edgar-Quinet dans le XIVe arrondissement parisien, comme le raconte «Le Parisien».

Comme à son habitude, ce sexagénaire vincennois, usager d’un fauteuil roulant, affiche sa carte mobilité inclusion – stationnement (CMI-S) derrière le pare-brise de sa Peugeot 307. Mais après le dernier rappel de la pièce, mauvaise surprise lorsque la famille retourne à la voiture : un forfait de post-stationnement (une amende qui ne dit pas son nom, NDLR) de 50 euros est à payer.

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Henri ignorait alors que Paris avait modifié ses règles de stationnement pour les personnes handicapées. Depuis mars 2021, il ne suffit plus d’apposer la carte européenne de stationnement. Les automobilistes concernés doivent s’enregistrer sur la plateforme Handi’Stat, ou bien prendre un «ticket handi» gratuit aux horodateurs à chaque stationnement. Cette évolution réglementaire permettait aux voitures LAPI (les sulfateuses à PV) de ne pas verbaliser hâtivement les personnes en situation de handicap.

Trois ans de procédure contre la Mairie de Paris

Face à cette verbalisation qu’il juge injuste, Henri Communal décide de contester. Dans son premier courrier à la mairie, il plaide la bonne foi : «Je ne savais pas qu’à Paris, il fallait prendre un ticket handicap au parcmètre ou se faire enregistrer», explique-t-il au Parisien. «C’est la première fois que je me fais ainsi verbaliser. J’aurais trouvé plus normal d’être averti». 

Le 24 janvier 2021, la Ville de Paris lui oppose une fin de non-recevoir. L’administration estime que «les éléments fournis ne permettent pas d’établir vos droits à stationner gratuitement sur la place occupée au moment de l’apposition du FPS», selon Le Parisien. Refusant d’abandonner, Henri saisit le 30 janvier la commission du contentieux du stationnement payant (devenue depuis le tribunal du stationnement payant). Les avocats de la ville maintiennent leur position, arguant qu’il n’a ni apposé sa carte ni procédé au référencement obligatoire.

Il faudra attendre trois ans pour que le tribunal tranche finalement en faveur d’Henri Communal, en août 2024. Dans son jugement, rapporte Le Parisien, la juridiction reconnaît «qu’à la date d’établissement de l’avis de paiement, la partie requérante était effectivement titulaire d’une carte européenne de stationnement pour personnes handicapées». Plus important encore, le tribunal considère que «c’est à bon droit que la partie requérante se prévaut de la gratuité du stationnement », même en cas d’oubli des prescriptions de l’arrêté municipal.

Le projet de carte numérique pour remédier à cette problématique

Ces litiges se répètent en France, alerte auprès de la ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap, la députée de la 7e circonscription de la Charente : Sylvie Dezarnaud (Droite Républicaine). Dans une question écrite à l’Assemblée nationale, la parlementaire pointe du doigt les difficultés causées par les véhicules de contrôle automatisés qui ne peuvent détecter les cartes CMI-S affichées sur les pare-brise, contraignant les personnes handicapées à des démarches de contestation «complexes, longues et souvent éprouvantes».

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Pour répondre à cette problématique, l’État développe un projet de carte CMI-S numérique, annoncé en 2023. Ce système vise à créer un répertoire centralisé permettant aux titulaires d’une Carte Mobilité Inclusion – Stationnement (CMI-S) d’enregistrer en ligne les plaques d’immatriculation associées à leur carte. L’objectif est d’automatiser la vérification des droits de stationnement par les systèmes LAPI et de prévenir ainsi les verbalisations abusives. Si le système a été testé dans deux communes en mars 2024, l’État n’a plus donné de nouvelles depuis.

Dans l’attente, la députée Sylvie Dezarnaud propose plusieurs mesures transitoires pour soulager les personnes handicapées : la création d’un guide simplifié de recours contre les FPS, la mise en place d’une plateforme dédiée pour faciliter le dépôt des contestations, et le renforcement de la communication auprès des usagers. Elle suggère également d’explorer des solutions technologiques, comme l’intégration des droits CMI-S directement dans les certificats d’immatriculation ou l’utilisation de QR codes lisibles par les systèmes LAPI.