Du colonialisme au post-colonialisme, Claire Denis replonge en Afrique avec son nouveau film The Fence

La réalisatrice française Claire Denis aborde dans son nouveau film The Fence, présenté au festival de Toronto, une thématique qui l'a suivie tout au long de sa carrière : le colonialisme en Afrique de l'Ouest. Claire Denis, qui a grandi sur ce continent où son père était administrateur colonial, se concentre cette fois-ci sur un chantier de construction conduit par des entreprises britanniques dans un pays d'Afrique non identifié. La cinéaste s'y interroge sur l'influence potentiellement négative de ce qu'elle appelle le « colonialisme moderne ».

Les compagnies « ne s'intéressent pas au pays et à leur peuple, seulement à l'argent que l'on peut se faire », a estimé auprès de l'AFP la réalisatrice de 79 ans, en marge du festival international du film de Toronto (TIFF).

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Dans ce film en anglais, Matt Dillon tient le rôle principal : il incarne Horn, un contremaître confronté au meurtre d'un ouvrier noir, abattu par son adjoint blanc. Quand la famille de la victime vient réclamer son corps, Horn s'applique à retarder ce moment pour protéger les intérêts de l'entreprise.

L'acteur américain qui a notamment joué dans Crash, lauréat de l'Oscar du meilleur film en 2005, ne considère pas son personnage comme « amoral ». Il est plutôt animé par un « instinct de défense de la compagnie et du pouvoir », explique-t-il à l'AFP.

Inspiration

Pour ce film, la réalisatrice s’est librement inspirée de la pièce Combat de nègres et de chiens de Bernard-Marie Koltès. Claire Denis a vécu une partie de son enfance dans ce qui est aujourd'hui le Mali, Djibouti et le Burkina Faso avant de retourner vivre en France. Son premier film très acclamé, Chocolat (1988), mettait en scène une famille blanche vivant au Cameroun à la veille de l’indépendance. La réalisatrice a toujours rejeté les parallèles avec sa propre enfance. Et son film le plus célèbre, Beau Travail (1999), se concentre sur l'entraînement d'un groupe de légionnaires français en Afrique de l'Est.

Le réalisateur afro-américain Barry Jenkins, dont le film Moonlight (2016) a gagné l'Oscar du meilleur film, a d'ailleurs avoué s'inspirer de la réalisatrice française, et a célébré son courage dans son traitement des questions raciales au cinéma. « Elle ne se dit pas qu'elle ne devrait pas être autorisée à manipuler ce matériel. Ce n'est pas un monde étranger pour elle, contrairement à ce que l'on pourrait croire en la voyant », estime Barry Jenkins.

Claire Denis estime qu'il est juste de considérer The Fence comme un film postcolonial. « Il existe aujourd'hui un colonialisme commercial, une exploitation des minerais et du pétrole, et je pense que cela est très évident dans certains pays de la côte ouest de l'Afrique », a-t-elle déclaré. Le film, sous le titre Le Cri des gardes, est annoncé pour février 2026 sur les écrans français.