Fashion Week : le show secret de Dolce & Gabbana, le retour de Lanvin, Vauthier à l’épure
Après Florence, Venise, la Sicile, la Sardaigne et tout ce que l’Italie compte de destinations idylliques, le « Grand Tour » de l’Alta Moda de Dolce & Gabbana (l’équivalent de la couture pour la maison) s’arrête à Paris. Le show, tenu secret, tombe à pic : l’exposition consacrée à la marque « Du cœur à la main » connaît des records de fréquentation au Grand Palais, qui a même étendu ses horaires d’ouverture. Pour l’occasion, les fidèles clientes de la maison ont fait le déplacement. Au premier rang, dans les salons de l’Hôtel de la Marine, Catherine Deneuve, Monica Bellucci, Tim Burton et Carla Bruni. Le duo livre une collection quasi intégralement noire, riche de dentelles, jouant comme il est de coutume la tension entre sensualité et iconographie religieuse (les voiles, les chapelets), rehaussée d’or et de références à la couture française. Le tout se clôt, une première chez Dolce & Gabbana, par une robe de mariée dans la plus pure tradition parisienne. Puis les modèles s’alignent sur la terrasse surplombant la place de la Concorde, posant pour les photographes et des clients sourire jusqu’aux oreilles. Bravo !
À lire aussi Le conte de fées de Dolce & Gabbana au Grand Palais, l’exposition évènement
Dimanche soir, Lanvin, la plus ancienne maison de couture française, qui n’avait pas défilé depuis mars 2023, faisait son retour au calendrier officiel (même si c’est celui de la mode masculine) avec le premier défilé de Peter Copping. « Dès mes premiers jours, j’ai voulu me plonger dans les archives qui sont incroyables, riches d’études de tissus et de broderies, raconte dans un français parfait, le Britannique passé chez Nina Ricci, Oscar de la Renta et plus récemment par les ateliers haute couture de Balenciaga. C’était un privilège de s’immerger dans l’univers de Jeanne Lanvin, dans son appartement, son bureau, j’ai été très ému. » C’est donc riche de cette exploration de la maison (propriété du conglomérat asiatique Fosun) que le designer a imaginé ce vestiaire de l’hiver 2025-2026 d’une sophistication sombre et luxueuse, presque hors du temps. « On s’habille plus comme ça de nos jours et c’est bien dommage ! », nous glisse à la sortie une spectatrice. Les cabans en drap de laine lourd, les manteaux d’officier en cuir et les trenchs en soie lavée se portent gantés et la chevelure tirée en arrière. Le raffinement s’exprime le soir avec ces robes de rubans tissés de fils de métal ou ces tabliers de dentelle noire et volants dorés passés sur un pantalon moiré. Si les passages masculins sont moins convaincants (joggings de laine et souliers pointus portés sans chaussettes), ce retour sous les projecteurs de Paris est applaudi.
« Dynamique, entreprenante, décidée, la femme Patou, c’est une femme radicale et vraie », explique Guillaume Henry à l’issue de son show au Palais de Tokyo dimanche soir. Dans une lumière rouge et sur une musique dont les basses font trembler les murs, elle fait irruption à grandes enjambées sur le podium, perchée sur des cuissardes en cuir vinyle, la moue boudeuse et les mains dans les poches de sa minirobe trois trous en lainage épais, réchauffée d’un manteau large. « Une des premières fois où je suis venu à Paris, j’étais, enfant, à l’arrière de la voiture de mes parents, j’ai vu passer Sonia Rykiel dans la rue. Je me souviens encore très bien de cette vision incroyable. » Y a-t-il de la Rousse incendiaire dans cette collection ? Il y a surtout beaucoup de rouge et de noir, de dentelle et de faille technique, de boucles fermoirs et de gros bijoux sur des blouses à cols froncés. « Je ne voulais pas que ce vestiaire soit “mignon” ! » N’est-il pas un peu too much ? Sans doute. Mais cette Parisienne aux faux airs de Romy Schneider dans Max et les Ferrailleurs (maintes fois épinglée sur les moodboards de la mode) a le mérite de tracer sa route, d’un pas assuré.
Alexandre Vauthier est de retour ! Après avoir passé son tour lors de la semaine de la couture en juillet, le couturier indépendant (aidé d’un nouvel investisseur, le groupe américain Revolve) présente son été 2025, lundi, dans les salons passés au blanc d’un hôtel particulier du quai de Conti. En bande-son, Lou Doillon décrit de sa voix rauque une scène de film en français et en anglais, les mannequins apparaissent le visage (quasi) nu, les cheveux vaguement noués en arrière. La collection est à leur image : sobre, altière, dépouillée. Les coupes asymétriques, les pantalons carotte à plis sur le côté, les vestes à carrures eighties, le noir et le beige s’enchaînent. On regrette les plumes et les fanfreluches, les cascades de strass brodées par Lesage et la meneuse de revue party girl auquel il nous avait habitués. Quelle n’est pas notre joie de voir passer un boléro rose en marabout et un top de franges de brillant ponctué de plumes, portés avec d’impeccables pantalons noirs. Tout simplement.