"Journée de Jérusalem" : marche et provocations ultranationalistes dans la Vieille Ville
Un ministre israélien d'extrême droite s'est rendu dans la matinée du lundi 26 mai sur l'esplanade des Mosquées à Jérusalem-Est, secteur occupé et annexé par Israël, au début des célébrations annuelles en Israël de la Journée de Jérusalem.
Troisième lieu saint de l'islam et site le plus sacré du judaïsme, l'esplanade est une poudrière où le moindre incident peut dégénérer au point d'embraser la région.
"Yom Yerushalaïm" ("Journée de Jérusalem" en hébreu) commémore pour les Israéliens ce qu'ils estiment être la "réunification" de la ville, depuis l'occupation de sa partie orientale en 1967.
Chaque année, à l'occasion de cette journée, des milliers de nationalistes israéliens, en majorité religieux, marchent dans les rues de Jérusalem, y compris dans la Vieille Ville, en brandissant des drapeaux israéliens, dansant, et chantant.
Pour de nombreux Palestiniens, ce défilé sous haute surveillance est perçu comme une provocation délibérée.
"Je suis monté sur le Mont du Temple pour la Journée de Jérusalem et j'ai prié pour la victoire dans la guerre (à Gaza), pour le retour de tous nos otages et pour le succès du nouveau chef du Shin Bet, le général de division David Zini. Joyeux Jour de Jérusalem !", a écrit le ministre de la Sécurité nationale israélien, Itamar Ben Gvir, dans un message sur Telegram, accompagné de photographies le montrant sur l'esplanade des Juifs.
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Paris condamne une "nouvelle provocation inacceptable"
La Jordanie, qui administre l'esplanade mais dont les points d'entrée sont contrôlés par Israël depuis la prise de Jérusalem-Est en 1967, a condamné "les pratiques de ce ministre extrémiste" qui "ne remettent pas en cause le fait que Jérusalem-Est est une ville occupée".
La France a elle aussi condamné la visite d'Itamar Ben Gvir sur l'Esplanade des Mosquées, "en violation du statu quo historique des Lieux saints à Jérusalem", y voyant une "nouvelle provocation inacceptable". Paris "appelle le gouvernement israélien à prendre toutes les mesures nécessaires pour faire respecter le statu quo historique sur les Lieux saints à Jérusalem", selon une déclaration du ministère des Affaires étrangères.
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La marche planifiée lundi se déroule pour la deuxième année consécutive sur fond de guerre dans la bande de Gaza, déclenchée par l'attaque lancée par le Hamas en Israël le 7 octobre 2023.
Des slogans "Mort aux Arabes"
Dès lundi matin, des groupes de jeunes venus de tout le pays se sont réunis près de la porte de Jaffa, arborant des T-shirts blancs comme c'est souvent le cas pour cette marche, a constaté une journaliste de l'AFP.
Leur marche doit les conduire jusqu'au mur des Lamentations à Jérusalem-Est, dernier vestige du Second Temple, détruit en 70 par les Romains, et le lieu le plus sacré où les juifs sont autorisés à prier.
Des groupes de jeunes juifs israéliens ont scandé "Mort aux Arabes" et chanté "Que votre village brûle !", tout en se frayant un chemin à travers les quartiers musulmans de la Vieille Ville de Jérusalem, avant la marche, indique l'agence AP.
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Les commerçants palestiniens avaient fermé tôt et la police stationnait dans les ruelles étroites avant la marche.
Des volontaires des organisations pacifistes Standing Together et Free Jerusalem ont tenté de se positionner entre les marcheurs et les résidents pour éviter les violences.
Un petit groupe de manifestants, dont un membre du Parlement israélien, a pris d'assaut un bâtiment situé à l'est de Jérusalem et appartenant à l'Agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa).
Une autre marche pour la paix
Comme les années précédentes, une "marche des fleurs" était aussi organisée par des militants israéliens désireux de contrer la marche nationaliste.
"Nous donnerons des fleurs de paix aux résidents de Jérusalem, tout particulièrement aux musulmans, aux chrétiens", a précisé l'organisateur, Gadi Gvaryahu, qui préside Tag Meir, une organisation fédérant des ONG œuvrant pour une co-existence pacifique.
Orly Likhovski, une responsable du Centre d'action religieuse d'Israël, explique à l'AFP que les participants de la marche aux fleurs "ne veulent pas accepter que la journée soit marquée par la violence et le racisme", en émettant l'espoir d'incarner un autre visage d'Israël.
Dans la Vieille Ville de Jérusalem, des Palestiniens surpris ont accepté les fleurs tendues. Mais un vieil homme a décliné : "Vous voyez ce qui se passe à Gaza ? Je suis désolé mais je ne peux pas accepter".
Plus loin des adolescents venus participer à la marche principale ont détruit les fleurs.
Des jeunes nationalistes israéliens ont été filmés par Free Jerusalem jetant des bouteilles d'eau sur les journalistes.
La police a expliqué dimanche prévoir le déploiement "de milliers" d'agents dans toute la ville pour éviter les incidents qui émaillent habituellement cette marche.
Avec AFP et AP