Il était temps. Il fallait bien que quelqu’un se décide à souffler un peu dans les bronches d’Alexandre Dumas, ce balourd de masculiniste. Houda Benyamina (Divines, qui n’était pas si mal) s’est dévouée. Vous savez quoi ? Les trois mousquetaires - quelle trouvaille - étaient des filles. Ça alors ! Et on ne nous disait rien. Après tout, c’est bien la moindre des choses que de faire mordre la poussière à ces bons gros stéréotypes. Voyons voir. Elles sont toujours trois et sont chargées de protéger la reine. Se joint à elles une morisque en fuite qu’elles adoptent et qui deviendra leur d’Artagnan. Voilà le travail. Et puis ? Et puis rien.
Le film patauge, ne sait pas sur quel pied danser, hésite entre western spaghetti et pamphlet vaguement féministe, enchaîne séquences montées à la va-comme-je-te-pousse et morceaux qui se voudraient de bravoure, le tout saupoudré de chansons anglo-saxonnes qui arrivent là comme des cheveux sur la soupe. Le suspense se résume à ceci : seront-elles découvertes ? Elles risquent la pendaison. Mille précautions s’imposent. Il s’agit de se coller de fausses moustaches, de se bander la poitrine, de prendre des voix graves, de se coller de solides bourrades sur l’épaule.
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Faiblesse du scénario
Avec de l’indulgence, il est permis de considérer qu’il y avait là une idée, une toute petite idée pas très originale. La réalisatrice n’en fait pas grand-chose, comme embarrassée par l’ampleur de la tâche. Le scénario pèche par sa faiblesse. Cela part dans tous les sens, multiplie les dialogues gravés dans le marbre. On passe sans raison valable du noir et blanc à la couleur. On comble les vides par des ralentis. Les intermèdes comiques ne sont pas drôles. Les duels sont cafouilleux. Les héroïnes font pipi debout. Elles trouvent ça tordant. Elles sont les seules. À un moment, elles apprennent à un nobliau à pleurer devant son épouse.
Cela n’en finit pas, malgré un énorme clin d’œil à un gag fameux de Quand Harry rencontre Sally. La joyeuse équipe saute d’une falaise et il faudrait sans doute songer à Butch Cassidy. Bah, non. La reine, plus gourde que jamais et pas exactement aidée par son interprète, rêve de retourner à Madrid (on la comprend), fume de l’opium, danse le flamenco dans un camp de Gitans. Ah ça, on revisite. La pauvre d’Artagnan, grimée, ressemble à Cyril Hanouna. Bref, cette manie de la relecture tombe à plat. Cela ne risque pas d’empêcher Dumas de dormir. Toutes pour une se révèle aussi nécessaire que l’écriture inclusive. Il aurait mieux valu montrer à quel point il est difficile d’être un homme, déconstruit ou pas. Dieu nous préserve d’une « Vicomtesse de Bragelonne ».
« Toutes pour une ». Aventure de Houda Benyamina
Avec Oulaya Amamra, Sabrina Ouazani, Déborah Lukumuena. Durée : 1 h 36
L’avis du Figaro : 0/4.