Comment l'assurance-chômage a été rabotée sous Emmanuel Macron, avec quatre réformes en six ans
Un nouveau coup de rabot en vue pour l'assurance-chômage ? Pour faire des économies, François Bayrou veut ouvrir un nouveau chantier dès la rentrée. Le Premier ministre a envoyé une lettre de cadrage aux partenaires sociaux vendredi 8 août, les invitant à trouver 2 à 2,5 milliards d'euros d'économies par an en moyenne de 2026 à 2029. Le gouvernement s'est fixé comme objectif de parvenir à un accord d'ici au 15 novembre et donne un cap à plus long terme aux partenaires sociaux, en précisant qu'il veut atteindre 4 milliards d'euros d'économies annuelles dès 2030.
Pour économiser, le chef du gouvernement semble favorable à un nouvel allongement la durée minimale de cotisation. Il souhaite aussi durcir les règles concernant les chômeurs ayant conclu une rupture conventionnelle et "intensifier" l'effort réalisé pour le retour à l'emploi des seniors. Il reviendra aux organisations patronales et syndicales de trouver un consensus.
La CGT et la CFDT ont déjà fait savoir leur opposition à cette nouvelle réforme de l'assurance-chômage. En cas d'échec, le gouvernement pourra imposer sa réforme par décret. Le dispositif d'aide aux demandeurs d'emploi a été successivement et largement durci en huit ans de présidence d'Emmanuel Macron. Retour en arrière.
En 2019, la durée de cotisation allongée
Dès le mois de juillet 2019, le gouvernement d'Edouard Philippe modifie par décret les règles d'indemnisation. Il allonge la durée minimale de cotisation ouvrant des droits au chômage, qui passe de quatre à six mois, au cours des deux dernières années (ou au cours des trois dernières pour les travailleurs âgés de 53 ans et plus). Cette réforme établit aussi une dégressivité des allocations pour les chômeurs les mieux indemnisés, dès le septième mois de chômage. En parallèle, les salariés démissionnaires et les travailleurs indépendants deviennent éligibles à l'assurance-chômage, à certaines conditions, très strictes.
Cette réforme a eu pour effet de réduire de 12% la durée moyenne du chômage et de diminuer de 18% le montant de l'allocation moyenne, soit 6 euros par jour. Elle "a uniquement stimulé la reprise d'emplois peu durables", des missions d'intérim et des CDD de moins de six mois, selon le rapport final d'évaluation publié par la direction des études du ministère du Travail en avril.
En 2021, le mode de calcul modifié au détriment des travailleurs précaires
Le changement de la méthode de calcul du salaire journalier de référence, qui détermine le montant des indemnités, figurait dans la réforme de 2019, mais il n'est entré en vigueur qu'à la fin de l'année 2021. Auparavant, il était calculé à partir des revenus perçus sur les douze derniers mois, divisés par le nombre de jours travaillés.
Depuis le 1er octobre 2021, ce salaire de référence est établi à partir des revenus des vingt-quatre derniers mois, divisés par le nombre de jours calendaires. Le montant des allocations perçues diminue mécaniquement si l'activité n'a pas été continue, puisqu'à situation égale avant et après la réforme, le même salaire se trouve divisé par davantage de jours. Les personnes alternant des périodes d'activité et de chômage sont donc défavorisées par ce nouveau calcul.
En contrepartie, cette réforme allonge la durée durant laquelle un salarié peut toucher des droits, de onze mois en moyenne à quatorze mois. Les chômeurs touchent donc moins d'indemnités, mais théoriquement plus longtemps.
En 2023, la durée d'indemnisation indexée sur le taux de chômage national
A partir du 1er février 2023, le gouvernement d'Elisabeth Borne a réduit de 25% la durée d'indemnisation des demandeurs d'emploi, en respectant un minimum de six mois. Les habitants des outre-mer, les intermittents, les dockers et les expatriés ne sont pas concernés par ce nouveau durcissement des règles d'indemnisation. L'exécutif instaure un mécanisme qui module la durée d'indemnisation des demandeurs d'emploi en fonction de l'état du marché de l'emploi.
Lorsque le taux de chômage global est supérieur à 9% ou s'il progresse d'au moins 0,8 point en un trimestre, la situation économique est considérée comme dégradée, et les demandeurs d'emploi en fin de droits peuvent alors bénéficier d'un allongement de 25% de leur durée d'indemnisation, jusqu'à six mois maximum pour les moins de 53 ans. A l'époque de l'entrée en vigueur de ces nouvelles règles, une étude de l'Unédic estimait que la moitié des nouveaux entrants seraient désormais couverts moins longtemps que par le passé.
En outre, le gouvernement supprime le droit à l'indemnisation en cas d'abandon de poste, et pour les salariés en CDD ayant refusé deux CDI en l'espace d'un an.
En 2025, un nouveau mode de calcul de l'indemnité, moins avantageux
Après de nouvelles négociations à l'automne 2024 entre partenaires sociaux, avec l'objectif fixé par le gouvernement de Michel Barnier de faire des économies, de nouvelles règles entrent en vigueur le 1er avril. Le montant de l'allocation chômage ne dépend plus du nombre de jours dans le mois, mais est calculé sur la base de trente jours tous les mois. Sur une année calendaire pleine, un chômeur perdra ainsi cinq jours d'indemnisation, voire six les années bissextiles.
Pour les seniors, les bornes d'âge ouvrant droit à une indemnisation plus longue sont relevées de deux ans. Le palier ouvrant droit à vingt-deux mois et demi d'indemnisation passe ainsi de 53 à 55 ans, et celui donnant droit à vingt-sept mois de 55 à 57 ans. En revanche, l'allocataire qui a repris un travail depuis moins de quatre mois (et non plus trois) pourra être à nouveau indemnisé s'il démissionne.
Quant aux travailleurs saisonniers, ils peuvent bénéficier d'une allocation chômage à condition d'avoir travaillé au moins cinq mois (et non plus six) au cours des vingt-quatre derniers mois. Et les anciens détenus ayant travaillé au titre d'un contrat d'emploi pénitentiaire, qui n'étaient pas indemnisés jusqu'à présent, peuvent l'être dorénavant, dans les mêmes conditions que l'ensemble des salariés.