Ces trois minutes qui ont vu le marché de Noël de Magdebourg basculer dans l’horreur

Les chalets du marché de Noël de Magdebourg ont fermé définitivement leurs volets. Ils n’ouvriront plus d’ici Noël pour proposer aux derniers retardataires leur large choix de cadeaux ou de confiseries. Tout s’est précipité en quelques minutes, trois seulement : vendredi soir, 5 personnes au moins sont mortes (dont un enfant de 9 ans) et 200 autres ont été blessées par un conducteur ayant volontairement foncé dans la foule dans le but de faire le plus grand nombre de victimes.

Selon le maire adjoint de Magdebourg Ronni Krug, qui s’est exprimé en conférence de presse ce samedi pour détailler le dispositif de sécurité autour du marché de Noël, celui-ci était «sous haute sécurité» grâce à un dispositif validé par la mairie en lien avec la police. Ce plan avait été encore renforcé le 24 novembre dernier après l’attaque au couteau de Solingen. L’attentat qui s’est produit était donc «imprévisible et en partie impossible à éviter si l’on voulait faire un marché de Noël à Magdebourg». La plupart des accès au marché de Noël étaient obstrués par des blocs de béton, et des contrôles étaient pratiqués aux différents points d’entrée des piétons. 

Seule une voie d’évacuation n’était pas encombrée : celle-ci avait pour fonction d’être empruntée par les véhicules d’intervention des secours tout au long de la durée du marché de Noël. Elle était plus sécurisée que les autres accès, avec des policiers armés et des véhicules blindés des forces de l’ordre.

À 19h 02 vendredi soir, c’est pourtant par cette voie d’évacuation que Taleb A., ressortissant saoudien réfugié en Allemagne en 2006, est arrivé au volant d’un SUV noir de la marque BMW qu’il avait loué au préalable. L’homme de 50 ans est arrivé du côté de la mairie de la ville, et a accéléré sur la place du vieux marché en percutant déjà plusieurs personnes, avant de poursuivre encore son accélération et de foncer cette fois sur la foule massée le long d’une des allées du marché de Noël. Les policiers commencent à enregistrer un premier appel téléphonique, puis des dizaines d’autres, pour signaler le drame.

Arrestation sous l’œil tétanisé des passants

Sur des images de vidéosurveillance qui ont enregistré l’attentat, on voit le véhicule remonter toute l’allée en quelques secondes à peine, à une vitesse folle, en faisant des zigzags sur une distance d’environ 400 mètres, au milieu d’une foule compacte. Des dizaines de personnes sont projetées des deux côtés du véhicule. Les 200 blessés dont 40 en état critique seront évacués dans une quinzaine d’hôpitaux et de cliniques des environs.

Après avoir foncé dans la foule en tentant de faire le maximum de victimes, le terroriste a tourné à l’angle de l’allée en se rapprochant de nouveau de la gare, là où avait commencé sa course meurtrière. Il finit par percuter alors un obstacle.

Il est désormais 19h 05 : trois minutes seulement se sont écoulées depuis le début de l’attentat. Sur l’Ernst-Reuter-Allee où le véhicule du terroriste est désormais immobilisé, le pare-chocs avant enfoncé et le pare-brise en miettes, un premier policier brandit son arme de service en direction du conducteur, sous l’œil des passants tétanisés. Quelques secondes plus tard, il est rejoint par un équipage d’une dizaine d’agents, tous l’arme à la main, qui encerclent rapidement le véhicule. 

Un policier allemand tient en joue un homme à lunettes, qui s’agenouille sous ses ordres. Dégarni et présentant une barbe grisonnante, Taleb A. semble s’adresser à l’agent, tournant ses paumes vers le ciel, avant de s’allonger complètement sur la route, face contre terre à côté de la BMW noire. Il s’est rendu sans opposer de résistance. 

Au lendemain de son attentat, l’homme était toujours auditionné en garde à vue par les enquêteurs. «Il semble qu’il ait eu une forme d’insatisfaction sur la façon dont les réfugiés saoudiens sont traités en Allemagne», a expliqué le procureur allemand Horst Walter Nopens dans une conférence de presse ce samedi après-midi, au sujet de ses motivations éventuelles. L’homme est un «loup solitaire» qui a donc «agi seul». Les raisons qui l’ont poussé à agir restent largement mystérieuses.