Notre critique de Moi qui t’aimais sur le couple Signoret-Montand: et la ressemblance bordel !
CRITIQUE - La réalisatrice de Diabolo menthe et de Sagan se penche sur le destin houleux, mais passionné, du couple star. Hélas, en refusant de jouer la carte de la ressemblance, son biopic s’abîme dans le ridicule.
Passer la publicité Passer la publicitéLe cinéma a le désagréable inconvénient d’être un art visuel. Lorsqu’on veut évoquer dans un biopic une star, ou même plusieurs, il convient avant même de se préoccuper de l’intrigue, de trouver la perle rare: le comédien qui va réussir à se faire oublier sous la défroque du personnage. Plus la star est connue, plus dur sera le défi à relever.
Jérémie Renier avait parfaitement su s’effacer pour évoquer le chanteur Claude François dans Cloclo. Même chose pour Sylvie Testud et Françoise Sagan, Louis Garrel en Jean-Luc Godard ou Tahar Rahim avec Aznavour, ou même Ana de Armas en Marilyn Monroe dans le film Blonde d’Andrew Dominik.
Passer la publicitéUne perruque et quelques mimiques ne suffisent pas
Diane Kurys qui n’est pas une débutante aurait dû y réfléchir à deux fois avant de se lancer dans un tel film. Sur grand écran, il ne suffit d’évoquer l’amour passion et les soubresauts houleux d’un couple comme celui formé par Simone Signoret et Yves Montand dans les années 1970-1980, il faut également que le public puisse les identifier du premier coup d’œil. Le philosophe Sénèque expliquait dans ses Lettres à Lucilius que même une simple imperfection, comme une tache sur la toge d’un orateur, peut détourner l’attention de l’auditoire et l’empêcher de se concentrer sur le contenu du discours.
C’est la même chose pour n’importe quel film biographique. Si le spectateur ne reconnaît pas physiquement la personnalité dont le film raconte la vie, il ne pourra jamais totalement s’y plonger. Dans Moi qui t’aimais, Roschdy Zem s’est fait la dégaine d’Yves Montand. Une perruque, un accent chantant et quelques mimiques ne suffisent pas. Marina Fois fait de même avec Simone Signoret. Mais sous les cheveux poivre et sel, elle reste avant tout Marina Fois. À aucun moment on ne croit voir le véritable duo Montand-Signoret. Pour paraphraser le titre de lac célèbre comédie de Patrick Schulmann (sortie en 1979) Et la tendresse? Bordel !, on aimerait lancer à Diane Kurys cette apostrophe : Et la ressemblance, bordel?!
Au lieu de cela, on assiste à une longue love story plutôt statique entre deux comédiens dont l’un devient plus connu que l’autre. Mais qui continuent de s’aimer par-delà les décennies. Cette relation passionnelle aurait pu faire un bon film. Roschdy Zem et Marina Fois auraient pu incarner ce couple-là. Le problème majeur est d’avoir voulu leur faire jouer Montand et Signoret.
Les acteurs ont beau être justes dans leurs sentiments, le manque de ressemblance interdit toute identification avec leurs illustres modèles. Il en résulte une catastrophe cinématographique qu’on se dépêchera d’oublier... en mémoire d’Yves Montand et de Simone Signoret.