Lee Jae-myung, populiste aux multiples scandales et grand favori de la présidentielle sud-coréenne

Lee Jae-myung a mené toute sa campagne présidentielle muni d'un gilet pare-balles. Visé par une tentative d’assassinat, le 2 janvier 2024 à Busan, le démocrate est le grand favori de l’élection présidentielle en Corée du Sud, avec 49 % des intentions de vote, selon une étude récente de l'institut Gallup

L'élection qui se déroulera mardi 3 juin, intervient après la destitution du président Yook Suk-yeol, le 4 avril 2025. La présidence du conservateur était suspendue depuis qu'il avait décrété la loi martiale dans la nuit du 3 au 4 décembre 2024.

Lee Jae-myung avait alors été l’un des premiers à demander l’annulation de la loi martiale, comprenant qu’il avait de grandes chances de victoire en cas d’élection anticipée. Le démocrate n’avait perdu qu'avec un écart de 1 % face à Yoon Suk-yeol en 2022. Il est aujourd’hui opposé à l'ancien ministre du Travail Kim Moon-soo, du Parti du pouvoir au peuple, celui de l'ancien président.

“La destitution de Yoon et le désordre chez les conservateurs semblent avoir offert à Lee la victoire sur un plateau d’argent”, affirme John Lee, analyste du service d'information Korea Pro, auprès du Financial Times.

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Scandales à répétition

Un statut de favori qui ne fait pas oublier les multiples scandales politiques dans lesquels Lee Jae-myung est empêtré.

Poursuivi pour des affaires de corruption, le candidat est suspecté, entre autres, d’avoir eu des liens avec une entreprise qui aurait versé illégalement huit millions de dollars en Corée du Nord. 

Il est aussi accusé d’avoir favorisé des promoteurs immobiliers de manière illégale dans une affaire de contrats douteux lorsqu’il était maire de Seongnam.

Le démocrate a également été jugé par la Cour suprême pour avoir "induit les électeurs en erreur quant à sa capacité à remplir des fonctions officielles", pendant sa campagne électorale de 2021. Un jugement pour des faits de "deux fausses déclarations liées à un projet immobilier controversé dans la ville dont il fut autrefois maire", rapporte France Info.

Enfin, Lee Jae-myung aurait poussé un témoin à mentir au tribunal.

Au sein de ces affaires, au moins cinq personnes liées de près ou de loin au candidat ont été retrouvées mortes, dont la plupart ressemblaient à des suicides, relate l’AFP.

Le candidat à la présidence du Parti démocrate de Corée du Sud, Lee Jae-myung, faisant un signe de la main lors de la campagne pour l'élection présidentielle à Séoul, en Corée du Sud, le lundi 2 juin.
Le candidat à la présidence du Parti démocrate de Corée du Sud, Lee Jae-myung, faisant un signe de la main lors de la campagne pour l'élection présidentielle à Séoul, en Corée du Sud, le lundi 2 juin 2025. © Ahn Young-joon, AP

Un parcours peu commun

Rares sont ceux qui auraient pu prédire ce destin à Lee Jae-myung, qui commence à travailler dans une fabrique de gants à l'âge de 11 ans. Son bras se bloque dans une presse à l’âge de 13 ans. Il devient alors handicapé à vie et admet alors avoir eu des pensées suicidaires.

À partir de 1980, le natif d’Andong, dans l’est de la Corée du Sud, étudie le droit pour devenir avocat, et se spécialise dans les droits humains. Étudiant, il rejoint l’opposition aux mouvements autoritaires, dans le contexte de l’arrivée au pouvoir du général Chun Doo-hwan, qui réprime alors violemment les mouvements pro-démocratie auxquels il participe.

C’est en 2010 qu’il entre en politique et milite contre les inégalités. Il devient alors maire de Seongnam, dans la périphérie de Séoul, puis gouverneur de la province du Gyeonggi. En 2019, il marque l’opinion publique en distribuant une allocation de base aux jeunes de sa province, dans un contexte où les inégalités deviennent un sujet majeur dans le pays, relate le Journal de Montréal.

En 2021, Lee Jae-myung prend la présidence de son parti. Cette même année, il déclarait à l’AFP vouloir “changer le système”. Ce même système qui l’a condamné à délaisser les bancs de l’école pour l’usine.

Il entame une grève de la faim en 2023 pour dénoncer les politiques "incompétentes et violentes" du gouvernement. Au bout de 19 jours, cette grève le conduit à l'hôpital.

Une campagne tendue

Après un premier échec à la présidentielle de 2022, il est de nouveau candidat en 2025, après la destitution de Yook Suk-yeol. La campagne s'avère particulièrement tendue, au-delà même du contexte politique.

Le démocrate, âgé de 61 ans, a été poignardé au cou avec “une arme blanche de 20 cm pour le frapper au niveau des veines jugulaires” à Busan le 2 janvier 2024, racontent Les Echos

L’assaillant, qui s’est fait “passer pour l’un des soutiens du candidat” pendant sa visite du chantier de construction d'un aéroport à Gadeokdo, voulait l’empêcher d’atteindre le pouvoir.

Après avoir été opéré, le candidat a poursuivi sa campagne avec un gilet par balles.

 

Un partisan du candidat à la présidence Lee Jae-myung du Parti démocrate tenant une pancarte lors d'un rassemblement politique en vue de l'élection présidentielle du 3 juin à Séoul le 1er juin 2025.
Un partisan du candidat à la présidence Lee Jae-myung du Parti démocrate tenant une pancarte lors d'un rassemblement politique en vue de l'élection présidentielle du 3 juin à Séoul le 1er juin 2025. © Pedro Pardo, AFP

 

Sortir de la crise

Le futur président du pays devra faire face à une crise économique qui s'aggrave, un taux de natalité parmi les plus bas au monde et la hausse du coût de la vie. Il devra également affronter la menace d'un voisin nord-coréen imprévisible et se positionner dans l'affrontement croissant entre les États-Unis et la Chine, son principal partenaire commercial.

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Pour relancer l'économie, le démocrate souhaite notamment placer la Corée du Sud dans le top trois des pays les plus performants dans l’IA.

Sur le plan international, Lee Jae-myung regrette une “approche inutilement hostile” avec la Chine et la Russie, dans un débat présidentiel cette semaine. Il promet également une "stabilisation" des liens avec les États-Unis et est également ouvert aux discussions avec la Corée du Nord.

Le candidat de la Corée du Sud s’est en revanche montré plus hostile à l’égard du Japon, au long de sa vie politique. Selon l'agence de presse Yonhap, le potentiel futur chef d'État a néanmoins affirmé cette semaine voir ce pays comme un "partenaire important pour la coopération", tout en rappelant vouloir préserver "les intérêts nationaux à l'ère d'un basculement total de l'ordre international".