Venezuela : la militante Rocio San Miguel est emprisonnée depuis un an

Incarcérée depuis un an, la militante vénézuélienne des droits de l'homme Rocio San Miguel, 58 ans, attend toujours son procès pour «terrorisme» et «trahison», qui devrait commencer cette semaine.

Les autorités accusent cette experte militaire et directrice de l'ONG Control Ciudadano, d'être impliquée dans un prétendu complot visant à assassiner le président Nicolas Maduro. Des accusations que sa défense nie en bloc. La militante ne peut recevoir que des visites de sa fille de 25 ans et attend d'être opérée d'une épaule cassée. Sa défense est assurée par un avocat commis d'office, qui lui a été imposé. La justice l'empêche d'être défendue par des avocats en qui elle a confiance.

Rocio San Miguel, qui a la double nationalité vénézuélienne et espagnole, a été arrêté le 9 février 2024 à 05H00 heure locale (9H00 GMT) dans la zone d'immigration de l'aéroport de Caracas. Au moment de son arrestation, elle était en compagnie de sa fille Miranda Diaz, qui a été brièvement détenue et se trouve en liberté conditionnelle.

Les procureurs la relient au «Brazalete blanco» (Brassard ou bracelet blanc), un complot présumé visant à attaquer une base militaire dans le Tachira, un État frontalier de la Colombie. Puis d'attaquer le président Nicolas Maduro. Son ex-compagnon, un officier militaire à la retraite, a également été accusé d'être impliqué. Mme San Miguel est détenue à El Helicoide, prison redoutée gérée par les services de renseignement que les organisations de défense des droits de l'homme qualifient de «centre de torture».

Le procès

Le procès devrait s'ouvrir mardi, bien que cette première audience ait déjà été reportée en décembre. Le tribunal a fait valoir que Mme San Miguel n'avait pas été transportée au Palais de justice, ce qui est une cause fréquente de retards de procédure dans les procès contre des opposants.

San Miguel, qui est également avocate, a insisté pour désigner ses avocats mais jusqu'à présent sa représentation a été confiée au bureau du défenseur public. Là aussi, c'est une procédure fréquente dans les affaires «politiques». Les commis d'office sont au mieux sous pression et dans le pire des cas au service du procureur, selon d'autres avocats interrogés par l'AFP.

Me Juan Gonzalez Taguaruco, qui a la confiance de Mme San Miguel, espère pouvoir remplacer le commis d'office mardi au début de l'audience et ainsi avoir accès au dossier, a-t-il expliqué à l'AFP confiant vouloir «soutenir» Mme San Miguel «de toutes les manières possibles».

Outre la «trahison» et le «terrorisme», elle est accusée de «conspiration», «d'association de malfaiteurs et tentative d'assassinat» contre M. Maduro et Freddy Bernal, gouverneur pro-pouvoir du Tachira. Maduro, qui dénonce régulièrement des complots et tentatives de déstabilisation, l'avait déjà accusée en 2014 d'être impliquée dans «un soulèvement militaire». Outre sa fille, trois autres membres de la famille de San Miguel ont été placés en détention, puis libérés sur parole.

Des conditions de détention difficiles

Des photos de San Miguel recevant des soins médicaux ont circulé en décembre: elle porte un T-shirt vert et sur l'une d'elles, elle tient une pancarte imprimée avec la date. Sur une autre, elle se fait prendre la tension artérielle.

À l'époque, elle souffrait d'une fracture qui nécessitait une intervention chirurgicale, laquelle n'a pas encore eu lieu à ce jour. «Elle ne reçoit que des analgésiques et sa capacité à s'habiller, à se laver et à manger est très limitée», explique Me Taguaruco, qui a précisé que l'avocat commis d'office avait promis de demander sa libération au moins provisoire pour qu'elle puisse subir cette intervention chirurgicale. «La façon dont elle a pu supporter tout ce qui s'est passé est admirable», souligne l'avocat.

Sa fille lui apporte médicaments ainsi que de la nourriture, chaque fois qu'elle lui rend visite, entre une et deux fois par semaine, pour une durée pouvant aller jusqu'à trois heures.

La détention de Mme San Miguel a eu lieu cinq mois avant l'élection présidentielle qui a vu le président Maduro être déclaré vainqueur alors que l'opposition crie à la fraude et revendique la victoire. Plus 2.400 personnes ont été arrêtées lors de la crise poste électorale qui s'est soldée par 28 morts et 200 blessés. Le Venezuela totalise plus de 18 000 arrestations pour motifs politiques depuis 2014, selon l'ONG Foro Penal, qui fait état de 1.196 personnes toujours derrière les barreaux.