Fort ralentissement des entrées en apprentissage en 2023, la promesse du million d’alternants d’Emmanuel Macron s’éloigne

L’apprentissage a-t-il atteint son plafond de verre ? Après plusieurs années de progression rapide ayant permis de faire passer le nombre de nouvelles entrées par an de 320 000 en 2018 à 835 000 en 2022, ce cursus à cheval entre école et entreprise a connu un sévère coup de frein en 2023. Sur un an, la progression s’établit à 2% , soit 15 000 contrats de plus pour atteindre 849 000, selon les chiffres de la Dares (l’institut de statistiques du ministère du Travail) publié ce mercredi. 

Comme lors des années précédentes, le développement de l’apprentissage est porté par l’enseignement supérieur. Sur un an le nombre d’entrées de bac+5 ou plus a augmenté de 5% alors que dans l’enseignement secondaire cette croissance n’est que de 1%. Résultat, la part des profils très diplômés ne cessent de grandir, ils représentent aujourd’hui 62% des alternants. Un retournement à 180 degrés par rapport aux années antérieurs à 2018. À cette époque, l’alternance était considérée par beaucoup de Français comme une filière réservée aux formations courtes et aux métiers manuels. Cette évolution est également visible dans l’évolution de l’âge moyen d’entrée dans l’apprentissage. En 2018, plus de 35% des nouveaux arrivants avaient moins de 18 ans. Et plus de 60% moins de 20 ans. En 2023, les 15-17 ans ne représentent que 20% des contrats démarrés dans l’année et les 18-19 ans 23%. C’est dorénavant les 20-25 ans qui s’adjugent la plus grosse part - 50%. 

La faible progression observée entre 2022 et 2023 remet encore un peu plus en question la promesse de campagne d’Emmanuel Macron qui assurait que la France pourrait atteindre le chiffre du million de nouveaux apprentis par an. Les premières années personne n’a osé critiquer l’ambition présidentielle. La croissance a deux chiffres des contrats signées poussait à l’optimisme. Toutefois dès le début de l’année, la tonalité a commencé à changer chez certains observateurs. «Les flux sont arrivés à une forme d’équilibre et devraient se stabiliser», pronostiquait début janvier Yannick L’Horty, économiste du travail et professeur à l’université Gustave Eiffel. Difficile en effet d’atteindre un million lorsque la population d’une classe d’âge plafonne à 750 000 personnes. 

La fin du «quoi qu’il en coûte»

Mais la plus grosse menace est ailleurs. L’envolée de l’apprentissage s’est faite au prix d’une explosion des dépenses. Prime à l’embauche de 6000 euros, prise en charge des coûts de formation, exonérations des cotisations patronales... L’État a subventionné à tout va pour attirer les entreprises. Si le succès a été au rendez-vous, la situation des finances publiques ne permet plus un tel «quoi qu’il en coûte». 

La perte d’influence d’Emmanuel Macron suite à la dissolution a permis de faire émerger le débat sur les pistes d’économies nécessaires à trouver du côté de l’apprentissage. Pour trouver quelques milliards, le gouvernement de Michel Barnier prévoyait une baisse du montant de la prime à l’embauche et un alourdissement des cotisations sur les apprentis. Ces tours de vis, que beaucoup voient comme inévitable à terme, ne seront pas sans impact sur les nouvelles entrées. Lors de la présentation du budget, l’objectif du président de la république avait été abandonné à bas bruit. 

Cette fin attendue de la parenthèse dorée de l’apprentissage ne doit pas faire oublier les acquis obtenus. Ce cursus a gagné ses lettres de noblesse et si la carotte financière n’est plus là, il garde de nombreux atouts pour les entreprises toujours à la recherche de nouveaux collaborateurs.