Les derniers secrets de Joseph Kessel: en 1968, l'étonnant Hubert Bouccara

Paris est désert. Dans le Quartier latin les étudiants chahutent, ils occupent l'université, le Théâtre de l'Odéon, forment des barricades. À quelques centaines de mètres de là, la paisible Académie française a fermé ses portes, ses membres n'ont plus l'âge de faire des éclats. C'est ce que pense l'un d'eux, Joseph Kessel. Il a vécu dans la Russie en proie à la révolution bolchevique, connu deux guerres mondiales, alors ce monôme… Il le suit avec indifférence. Depuis cette année, il a 70 ans. Les jeunes ? Il en fréquente peu, hormis Patrick, son neveu. Ses amis se sont appelés Mermoz, Béraud, le résistant d'Astier de la Vigerie. Aujourd'hui, ils ont nom Schoendoerffer, Nucéra, Courrière, Moretti.

Cohn-Bendit, July, les maos, il les laisse volontiers à Sartre et Aragon.

Pourquoi ce 15 mai 1968, Kessel est-il sur la placette devant l'Institut de France ?

Quelques jours plus tôt, celui que ses amis appellent Jef a reçu un pli inattendu : des cahiers d'écolier remplis avec soin, et formant un commentaire raisonné de son œuvre : naïf, frais, intéressant. Chaque livre résumé et analysé d'une écriture enfantine. Et à la dernière page une lettre qui demande à le rencontrer. L'enveloppe a été déposée à l'Institut, quai de Conti. En mains propres : la poste est en grève depuis quelques semaines.

Jef s'interroge. Au fait, pourquoi a-t-il donné suite à cette demande ? A-t-il été touché par la démarche d'un lycéen qui s'intéresse à une œuvre que bien des critiques dédaignent ? Est-ce le nom de l'expéditeur, Bouccara, qui évoque une ville d'Ouzbékistan dans cette région qu'il aime tant depuis ses séjours en Asie centrale ?…

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