Droits de douane : dans le viseur de Donald Trump, que peut faire l'Europe pour riposter ?
Après le Canada et le Mexique, l'Europe va-t-elle subir elle aussi une hausse des droits de douane ? C'est ce qu'a affirmé Donald Tump, vendredi 31 janvier, sans préciser de chiffre ni de date. L'Europe est dans son viseur.
Le président américain a les yeux sur les chiffres du commerce et les Etats-Unis achètent beaucoup plus de marchandises à l'Europe que l'inverse : 500 milliards d'euros par an d'un côté, 350 milliards de l'autre. Le déficit commercial est au détriment de Washington. Donald Trump compte bien le réduire, précisément avec ces droits de douane, pour pénaliser l'entrée de produits européens sur le sol américain.
Les voitures allemandes directement ciblées
Pour l'instant, Donald Trump n'est pas entré dans le détail : s'agira-t-il de droits de douane généraux, où toutes les marchandises, tous les services seraient concernés ? Ou bien seulement certains produits ? Lors de son premier mandat, Donald Trump avait surtaxé l'acier et l'aluminium, ainsi que les vins et spiritueux européens. Joe Biden avait ensuite suspendu cette surtaxe. Les professionnels de la filière craignent son retour.
Mais le secteur le plus directement visé par le président américain, ce sont les voitures allemandes. Donald Trump s'est agacé de voir des Mercedes qui descendent les avenues de New York. Il laisse planer la menace d'une surtaxe contre les véhicules européens qui arrivent sur le marché américain, d'où la nécessité, pour l'Europe, de se préparer à cette guerre commerciale.
En guise de riposte, l'Europe peut décider de rendre coup pour coup. Par exemple, en instaurant, elle aussi, des droits de douane sur certains secteurs. Lors du premier mandat de Donald Trump, l'Europe avait riposté en surtaxant les Harley Davidson, ces motos emblématiques de l'Amérique. "Si nous étions attaqués sur les sujets commerciaux, l'Europe, comme une puissance qui se tient, devra se faire respecter et donc réagir", a estimé Emmanuel Macron en fin de matinée lundi, à son arrivée au sommet informel des 27, à Bruxelles.
Les dirigeants européens divisés
L'Union européenne peut aussi aller plus loin et dégainer, pour la première fois, un mécanisme qui s'appelle l'instrument anti-coercition. C'est un peu "l'arme nucléaire" en matière commerciale. Elle n'a jamais été utilisée depuis sa création, le 27 décembre 2023. Cet instrument permet, vis-à-vis d'un Etat étranger, d'augmenter les droits de douane, de contrôler ses investissements dans l'UE et de limiter - voire de fermer - son accès au marché européen. Ce serait la riposte maximale. Elle suppose que tous les dirigeants européens soient d'accord et c'est loin d'être le cas.
Parmi les 27, plusieurs Etats sont favorables à une ligne conciliante avec Washington. Ainsi, les pays d'Europe centrale et orientale rechignent à fâcher l'allié américain, qu'ils voient comme le garant de leur sécurité face à la menace russe. De même, les pays du nord de l'Europe, traditionnellement partisans du libre-échange, répugnent à toute mesure protectionniste. Alors pour apaiser la colère de Donald Trump, ils sont prêts à acheter davantage de marchandises américaines - des équipements militaires, mais aussi du pétrole et du gaz.
La Haute représentante pour la diplomatie européenne, Kaja Kallas, est aussi sur cette ligne : en cas de guerre commerciale, estime-t-elle, "celui qui rira, c'est la Chine". Le chancelier allemand Olaf Scholz appelle à la "coopération" avec Washington, même s'il se dit prêt à étudier une riposte douanière. Alors faut-il tenter d'amadouer le président américain ou bien lui montrer les muscles ? Au sein des 27, les débats s'annoncent intenses.