Angleterre-France : les coups de cœur et coups de griffe de notre envoyé spécial

COUPS DE CŒUR

La Rose retrouve ses épines

Pas grand monde ne croyait en eux avant ce Crunch. Avec seulement trois victoires lors de ses dix derniers matches, l’Angleterre ne s’avançait pas en favorite face à la France d’Antoine Dupont. En mémoire, aussi, cette humiliation subie face aux Bleus, ici même, il y a deux ans. Mais le XV de la Rose n’est jamais aussi dangereux que quand on ne l’attend pas. Seul contre tous. Certes, les sujets de Sa Majesté ont bien été aidés par les (trop) nombreux ratés Français. Mais ils n’ont jamais baissé les bras, toujours au contact, ils ont su renverser la vapeur dans les derniers instants. Force de caractère. Après leur défaite à Dublin où ils s’étaient effondrés à l’heure de jeu, ils n’ont pas connu ce samedi de pareil trou d’air. Bien au contraire.

Moefana, la loi du milieu

Très discret lors du récital face au pays de Galles, Yoram Moefana a cette fois été l’un des hommes forts côté tricolore à Twickenham. Un match solide, où il a fait parler sa puissance face aux clients anglais, adeptes du défi physique. Un match convaincant où il a su alterner : faire jouer autour de lui ou aller au contact. Depuis la prise de fonction, le Wallisien est de toutes les convocations de Galthié. Il a su s’affirmer, au fil des années, comme un incontournable du groupe France. Premier choix en numéro 12 depuis deux matches, le centre de l’UBB a clairement marqué des points face aux Anglais. Pas évident vu les circonstances de cette défaite frustrante.

Fin Smith tient la baraque

Le choix de Steve Borthwick était osé, plutôt périlleux. Lancer le jeune Fin Smith à l’ouverture face aux Bleus et décaler l’autre Smith, le remuant Marcus, à l’arrière. Au final, le coup de poker a été gagnant. Si le demi d’ouverture de Northampton a eu besoin de quelques minutes pour rentrer dans son match (dégagement contré par Alldritt), il a ensuite parfaitement régulé le jeu anglais, offrant même en fin de match l’essai de la victoire à Elliot Daly. Son association avec Alex Mitchell, son coéquipier chez les Saints, a évidemment facilité sa première sortie sous le maillot blanc comme titulaire. Prometteur pour la suite.

COUPS DE GRIFFE

Le bal des occasions manquées

De mémoire, difficile de trouver un match avec autant d’occasions manquées, vendangées, inabouties du XV de France. Un vrai festival ! Ce samedi, Antoine Dupont et les siens ont gâché au moins cinq grosses occasions de marquer. Frustrant, forcément. Mais inquiétant, surtout. Quand on connaît la force de frappe offensive des Toulousains et des Bordelais, qui font des ravages en Champions Cup, on cherche des explications. Ballon glissant ? Pas évident. Suffisance ? Fabien Galthié a balayé cette hypothèse. «Cela a rappelé le scénario d’il y a deux ans, sauf qu’on marquait», a avancé le sélectionneur tricolore. Un jour sans, au plus mauvais moment.

Un banc qui n’a pas eu d’impact

C’est l’une des grandes forces de ce XV de France. Habituellement. Quand le staff des Bleus fait entrer ses «finisseurs» avec notamment son banc en 6-2, le XV de France finit fort ses matches. Soit il tient le score, soit il parvient à faire la différence. Cela n’a pas été le cas ce samedi à Twickenham. Les remplaçants n’ont pas eu l’effet escompté. Le deuxième-ligne Hugo Auradou a par exemple été en difficulté sur trois renvois anglais. En face, le banc anglais - plus expérimenté - a lui eu un réel impact. Avec notamment Jamie George et Elliot Daly, qui a inscrit l’essai de la victoire. Sur ce coup, Steve Borthwick a vu juste. «On attendait que les finisseurs continuent de mettre la pression sur l’équipe. On va prendre le temps de bien analyser pour voir ce qu’on peut faire de mieux. Mais, je ne peux pas répondre par le mot satisfaction quand on perd un match d’un point sur la dernière action», a d’ailleurs maugréé Fabien Galthié à propos de son banc après la rencontre.

La génération dorée encore sans titre

L’histoire se répète et la même question va revenir sur le tapis : la génération dorée des Dupont, Ntamack, Penaud et Alldritt n’a gagné qu’un Grand Chelem en 2022. Caramba encore raté pour cette année ! Chacun y était allé de sa petite remarque sur le sujet, d’Ugo Mola à Antoine Dupont, avec le même constat. Cette génération est l’une des plus talentueuses qu’ait connue le rugby français, mais elle n’a qu’un titre à son palmarès. Fabien Galthié a beau répéter que cette équipe à gagner 80% de ses matches (moins, en fait, puisqu’il compte entre autres le nul sur tapis vert face aux Fidji lors du Covid et le match non officiel face à l’Uruguay), on retient que les lignes de palmarès. C’est reparti pour en parler pendant un an. À moins que les Bleus ne gagnent ce Tournoi. Mais ça n’aura pas la même saveur qu’un Grand Chelem…