Le Rassemblement national de nouveau mis en cause pour des irrégularités au Parlement européen
Défaut d'appels d'offres, surfacturations et dons à des associations... Après l'affaire des assistants parlementaires européens, qui a valu à Marine Le Pen et plusieurs cadres de son parti une condamnation fin mars, de nouvelles accusations venues de Bruxelles visent le Rassemblement national. Le parti d'extrême droite et plusieurs de ses alliés au Parlement européen sont soupçonnés de diverses irrégularités, selon un rapport de l'institution révélé jeudi 3 juillet par Le Monde avec d'autres médias allemands et autrichien.
Le parti est suspecté, avec ses alliés de l'ex-groupe Identité et Démocratie, d'avoir "indûment dépensé" plus de 4,3 millions d'euros entre 2019 et 2024, selon un rapport de la direction des affaires financières du Parlement européen. D'après ce document, dévoilé par le journal du soir ainsi que par l'émission de télévision allemande Kontraste, le magazine Die Welt et l'hebdomadaire autrichien Falter, la majeure partie de cette somme a bénéficié à deux sociétés liées à des proches de Marine Le Pen, à savoir son ancien conseiller Frédéric Chatillon et son épouse Sighid Blanc. L'agence de communication e-Politic a ainsi perçu 1,7 million d'euros après un appel d'offres "purement formel" et entaché de "graves problèmes de conformité" selon les inspecteurs bruxellois, qui estiment par conséquent que "toutes ces dépenses (...) sont irrégulières".
Plus de 700 000 euros distribués en cinq ans
Même chose pour l'entreprise Unanime, qui a empoché plus de 1,4 million d'euros pour des travaux d'impression, de surcroît sous-traités à moindre coût, avec une marge évaluée à 260 000 euros. Des faits qui rappellent l'affaire dite "des kits de campagne", dans laquelle Frédéric Chatillon, Sighid Blanc et des membres de l'ex-Front national avaient été condamnés pour escroquerie et abus de biens sociaux. Le RN et ses alliés sont par ailleurs incriminés par le Parlement européen pour de multiples dons à des associations n'ayant "aucun lien" avec leurs activités politiques à Bruxelles. Stérilisation de chats errants, amicale de sapeurs-pompiers, restauration d'une paroisse... Au total, plus de 700 000 euros ont ainsi été distribués en cinq ans à des structures souvent liées à des proches d'eurodéputés d'extrême droite ou situées dans leur région d'élection.
Auprès du Monde, l'ancien secrétaire général du groupe Identité et Démocratie, le Belge Philip Claeys, a rejeté en bloc ce qu'il a qualifié d'"allégations incorrectes", assurant que "tous les paiements effectués dans les cinq dernières années ont été dûment facturés, justifiés et contrôlés". Interrogée jeudi matin à ce sujet sur RTL, Marine Le Pen a affirmé ne pas en avoir eu connaissance : "Je ne sais pas ce qu'il en est, je n'ai pas regardé ce dossier". Mais "il peut y avoir des désaccords administratifs avec le Parlement européen" et "on va essayer, encore une fois, de les résoudre", a-t-elle ajouté, avant de qualifier l'institution d'"organe politique [qui] mène à l'égard de son opposition une guerre de tranchées" et lui "cherche des noises matin, midi et soir, en toute circonstance".