Les célébrants de Notre-Dame de Paris habillés par les artisans de la haute couture
Ce samedi à 20h15, après un discours sur le parvis du président Macron, Monseigneur Ulrich entamera l’office d’ouverture en frappant de sa crosse les portes fermées de la cathédrale. Notre-Dame lui «répondra» avec un psaume chanté trois fois et le portail s’ouvrira. L’archevêque de Paris arborera pour la première fois la chape taillée pour lui par le façonnier Paloma, brodée de croix or et rouge par les artisans de Montex et Lesage, fermée par un chrisme (le «monogramme du Christ » formé des deux majuscules grecques X et P) façonné par les orfèvres de Goossens. Il sera également coiffé d’une mitre fabriquée par Maison Michel. Ce sont en effet cinq maisons d’art et d’artisanat du groupe 19M (dans le giron de Chanel) travaillant habituellement pour les marques de luxe, qui ont œuvré d’arrache-pied pendant six derniers mois pour donner vie aux vêtements et ornements liturgiques créés par Jean-Charles de Castelbajac.
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Les artisans français seront jusqu’au bout les stars de cette réouverture de Notre-Dame. Dans le sillage de tous ceux qui ont participé à la restauration de la cathédrale, ce sont aussi des mains en or qui ont travaillé pour la beauté des offices de réouverture qui se multiplieront jusqu’au mois de juin. « Le diocèse de Paris a souhaité faire appel au talent et à la créativité de Jean-Charles de Castelbajac, associés au savoir-faire sans pareil des maisons d’art de la mode résidentes du 19M, pour créer et produire les nouveaux ornements liturgiques de la cathédrale. Au même titre que la qualité de la restauration patrimoniale en cours et de l’intervention des nombreux artisans et artistes de l’Atelier de Notre-Dame, la création de ces vêtements manifeste tout le soin apporté par la cathédrale à sa réouverture et la joie d’y célébrer à nouveau la liturgie », a déclaré Monseigneur Ribadeau Dumas, recteur-archiprêtre de la cathédrale Notre-Dame de Paris, dans un communiqué.
Pas moins de 2000 pièces (vêtements et ornements) ont été produites en quelques mois, et seront revêtues dès ce samedi par les 700 célébrants (archevêques, évêques, prêtres et diacres). Les uns après les autres, chaque artisan a apporté sa pierre à cet édifice. L’atelier Paloma a façonné satin de laine français et drap de laine d’Écosse. Chez Lesage et Montex, de multiples opérations de broderie, transfert, perforation, flocage, sublimation (un savoir-faire minutieux permettant d’appliquer délicatement de la feuille d’or dans les tissus) se sont multipliées. Chez Maison Michel, chapelier depuis 1936, on a fabriqué 192 mitres, ce couvre-chef des évêques dont la pointe symbolise l’élévation vers Dieu et qui doit se plier facilement pour voyager, dans six coloris différents, agrémentés d’un flocage doré et velours de Lesage.
De leur côté, les orfèvres de Goossens ont réalisé un moule et fondu les fermoirs des chapes de l’archevêque et des évêques en forme de chrisme, avant de les plonger dans un bain d’or et de les polir à la main. Cette maison travaille pour la seconde fois sur une pièce religieuse. Dans les années 1980, Yves Saint Laurent s’était adressé à eux pour réaliser la couronne de la Vierge de Notre-Dame de Compassion, de l’église parisienne du même nom, dont le créateur avait, lui, offert la robe.
C’est la seconde fois que le créateur de mode Jean-Charles de Castelbajac mène à bien une opération d’envergure pour l’église. En 1997, le Français était directeur artistique des Journées Mondiales de la Jeunesse à Paris, et avait dessiné les tenues multicolores du Pape Jean-Paul II, des évêques et des prêtres. Le brodeur Lesage et la chapellerie Maison Michel avaient déjà participé à cette opération. Cette fois-ci, pour le projet de Notre-Dame, le fil conducteur de son inspiration est la croix dorée de Marc Couturier (datant de 1995 et miraculeusement rescapée dans l’incendie) ainsi que l’éclat de la lumière colorée des vitraux. La moitié de ces ornements liturgiques ont été offerts à Notre-Dame sous forme de mécénat par 19M.