Guerre commerciale : "C'est le début d'une marche vers l'indépendance" de l'Europe, estime Christine Lagarde

La situation géopolitique et économique actuelle, avec notamment l'augmentation des droits de douane décidée par Donald Trump, "est le début d'une marche vers l'indépendance" de l'Europe, indique lundi 31 mars sur France Inter Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne. "Je considère que c'est un moment où nous devons ensemble décider de prendre mieux notre destin en main et je pense que c'est une marche vers l'indépendance."

"Nous sommes dans un moment existentiel pour l'Europe", ajoute Christine Lagarde, appelant à être capable "d'entamer ensemble cette marche vers l'indépendance à la fois sur le plan de la défense, de l'indépendance énergétique et sur le plan financier et numérique". "Nous devons prendre les rênes en main, maintenant", insiste-t-elle.

"Toute guerre commerciale fait des perdants"

Dans ce contexte particulièrement incertain, "l'inflation est un combat de tous les jours", souligne la présidente de la BCE. Avec une prévision de 2,3% en Europe cette année, "on est presque dans tous les clous, mais il faut y rester". "Notre impératif absolu est de maintenir la stabilité des prix", rappelle-t-elle. "On est tous déterminés à arriver à cette cible de 2%. Pour y parvenir, certains veulent galoper, aller très vite. D'autres se disent 'allons à petit trot, voyons quels sont les obstacles sur la route'", souligne-t-elle, appelant à ne pas "anticiper" mais à "enregistrer toutes les données" et à avoir "une analyse sérieuse de la perspective de la stabilité des prix".

Ainsi, "dire que c'est terminé, c'est derrière nous, non, car malheureusement, nous sommes soumis à des tas d'incertitudes", souligne-t-elle. Christine Lagarde cite notamment les décisions de Donald Trump sur les droits de douane. Le début d'une guerre commerciale qui "entraînerait une baisse de la croissance de la zone euro de -0,3%", et de "-0,5%" si l'Europe applique une politique de réciprocité. "Toute guerre commerciale fait des perdants. Personne ne gagne", souligne-t-elle.

Questionner l'épargne européenne

La présidente de la BCE appelle dans ce contexte à s'interroger sur les placements de l'épargne des Européens. "Aujourd'hui, les Européens économisent considérablement plus que les Américains. Cette épargne va pour l'essentiel sur des comptes de dépôt, qui ne rapportent pas beaucoup, et cet argent est placé largement en bons du trésor américain. Donc notre épargne européenne finance l'économie américaine", indique Christine Lagarde. "On a peut-être besoin de s'interroger sur les financements qui sont nécessaires ici en Europe et sur la manière dont on peut les organiser."

Concernant les placements sur les politiques de réarmement, elle indique que "la sécurité n'est jamais risquée, c'est un impératif". "Il faut que des produits d'épargne soient conçus" pour "financer des dépenses en matière de défense", demande-t-elle, appelant aussi à "simplifier" la circulation de l'argent en Europe. Interrogée enfin sur le déficit de la France, Christine Lagarde rappelle qu'il est "impératif de rétablir la stabilité des finances publiques et d'avoir une dette soutenable sur le moyen et long termes". Elle appelle à une "reprioritisation des dépenses publiques". "Si on veut financer un effort de défense, il faut impérativement reprioritiser. Des dépenses devront être réduites", indique la présidente de la BCE.