Un petit pavillon d’un quartier tranquille du nord-Isère arrosé à l’arme automatique en pleine nuit alors que la porte d’entrée est en proie aux flammes. La vidéo postée en ligne ce lundi 21 avril et siglée «DDPF» fait froid dans le dos. Elle a été tournée la nuit précédente à Villefontaine, commune située à une trentaine de kilomètres au sud est de Lyon. Le commando à l’origine de ces instants de terreur, visait le domicile d’un agent pénitentiaire de la prison de Saint-Quentin-Fallavier, voisine. Une inscription a été retrouvée taguée sur le domicile.
«Par erreur, les agresseurs ont en réalité ciblé le domicile d’un voisin, croyant viser notre collègue», affirme le syndicat FO Justice sur les réseaux sociaux. «Des graffitis DDPF (droits des prisonniers français, NDLR) ont été découverts sur place», a précisé le parquet national antiterroriste (Pnat) dans un communiqué, après s’être saisi des faits. Une deuxième habitation a été ciblée, elle aussi par des jets de cocktails molotov et des tirs, sans inscription découverte. Le lotissement est connu pour abriter plusieurs logements d’agent pénitentiaires.
Au bas de la vidéo un commentaire invite à dénoncer les adresses de fonctionnaires contre rémunération. «1000€ à la clef pour toute adresse de surveillant donnée, 2000€ pour chaque adresse : chef ou grader (sic), 5000€ pour adresse directeur de prison, annonce le texte. Et merci au personnel pénitentiaire de vendre leurs collègues pour une poignée de billets».
Véhicules incendiés à la prison de Lyon Corbas
Des renforts ont été mis en place autour de deux établissements pénitentiaires dans la région. Idem dans le département voisin du Rhône où la prison de Corbas avait été visée par des incendies de véhicules. Un mineur a été interpellé quelques heures plus tard près de la prison et placé en garde à vue selon le parquet. Il est soupçonné d’avoir voulu commettre un acte de malveillance, selon une source proche du dossier, mais le parquet indique qu’un lien n’est pas établi à ce stade.
Selon des sources syndicale et policière, une voiture appartenant à un surveillant a également brûlé dans la nuit sur un parking proche de la prison de Villefranche-sur-Saône. Deux surveillants de cet établissement avaient porté plainte mi-avril pour des messages sur l’application TikTok révélant leur identité quelques jours plus tôt, selon le parquet de Villefranche.
«Il n’y a pas eu de blessés mais ces faits constituent des intimidations contre la République au moment où nous remettons de l’autorité et de l’ordre dans nos prisons», a réagi sur X le ministre de la Justice Gérald Darmanin, disant «pouvoir compter sur la fermeté du ministère de l’Intérieur pour interpeller rapidement les auteurs et mettre fin à ces désordres»
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Le parquet national antiterroriste saisi
Concernant les incendies et fusillade de Villefontainre, une enquête a été ouverte pour participation à une association de malfaiteurs terroriste en vue de crime contre les personnes ainsi que tentative d'assassinat sur personne dépositaire de l'autorité publique et dégradation ou détérioration en bande organisée du bien d'autrui par un moyen dangereux pour les personnes, en relation avec une entreprise terroriste. Elle est confiée à la police judiciaire et la Direction générale de la sécurité intérieure.
Le Pnat s'est saisi de multiples faits visant depuis mi-avril plusieurs établissements pénitentiaires et des surveillants en France. Il a précisé ce lundi être «en lien avec les parquets territoriaux» concernant d’«autres destructions par incendie intervenues dans la nuit». Un groupe revendiquant la «défense des droits des prisonniers français», ou DDPF, sigle retrouvé aux abords des prisons prises pour cibles, avait publié vidéo et menaces sur la messagerie cryptée Telegram.
Le syndicat FO Justice a envoyé lundi une lettre ouverte au ministre de la Justice Gérald Darmanin pour lui demander un état des lieux des accès principaux des établissements pénitentiaires et leur sécurisation. Compte tenu des attaques récentes, il est «inacceptable» pour le syndicat que «plusieurs structures pénitentiaires disposent encore de portes d'entrée principales fragilisées, équipées de vitrages obsolètes, voire endommagés». Et de déplorer que les établissements pénitentiaires soient «devenus des cibles clairement identifiées».
Les attaques visant établissements ou agents pénitentiaires ont débuté il y a plus d'une semaine. Les ministres de la Justice Gérald Darmanin et de l'Intérieur Bruno Retailleau ont envoyé jeudi des consignes pour que la sécurisation des prisons soit renforcée.