Les partenaires commerciaux des États-Unis cherchent la parade face aux massifs droits de douane

Stupéfaits par l'ampleur de l'offensive américaine sur les droits de douane, qui rebat les cartes du commerce mondial, les principaux partenaires commerciaux des États-Unis cherchent la parade jeudi 3 avril. Ils se sont globalement abstenus de jeter immédiatement de l'huile sur le feu.

D'autant que la présidence américaine a laissé la porte ouverte à des négociations et mis en garde contre toute velléité de représailles sur les exportations américaines, au risque d'une sanction douanière supplémentaire.

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Paris présente un plan de riposte

Quelques heures après l'annonce par Donald Trump, Emmanuel Macron a énuméré les premiers termes de "la riposte" souhaitable à cette décision "grave et infondée" des Américains, qui passe selon lui par l'unité et par la suspension temporaire des investissements européens dans ce pays.

Pendant deux heures jeudi, le président français a reçu à l'Élysée le Premier ministre François Bayrou, des membres du gouvernement, du patronat et des filières les plus exposées – aéronautique, agriculture, viticulture, chimie, électronique, métallurgie, santé, cosmétiques. L'automobile, qui sera touchée par une taxe spécifique de 25 %, n'était pas représentée.

Emmanuel Macron n'a pas rosi le tableau : la décision américaine aura "un impact massif", a-t-il dit, rappelant que les exportations vers les États-Unis représentent "1,5 % du PIB" français, 3 % du PIB italien, 4 % du PIB allemand et 10 % du PIB irlandais.

Il a appelé à une première riposte mi-avril, avec "des réponses sur le paquet acier et aluminium", déjà surtaxé par les États-Unis. "La deuxième réponse, plus massive, celle aux tarifs annoncés hier (mercredi, NDLR), se fera à la fin du mois", a-t-il promis, après une étude secteur par secteur et un travail avec les autres États membres de l'UE.

Et "tant qu'on n'a pas clarifié les choses", Emmanuel Macron a appelé ses interlocuteurs à "suspendre" les investissements qui devaient être faits aux États-Unis.

Le dialogue privilégié en Europe

La plus grande crainte du président de la République semble être celle d'une désunion au sein de l'UE. Il faut "jouer européen", a-t-il dit, sans "échappée solitaire". "Je sais ce qu'il va se passer, les plus gros auront tendance à jouer solo. Et ce n'est pas une bonne idée."

De son côté, la Première ministre italienne, Giorgia Meloni, a estimé qu'il fallait avoir pour objectif de "supprimer" les droits de douane", "pas (de) les multiplier" par une surenchère de part et d'autre de l'Atlantique.

Le commissaire européen au Commerce, Maros Sefcovic, a annoncé qu'il allait parler avec ses homologues américains vendredi.

Il a rappelé l'ouverture au dialogue de l'Union européenne tout en prévenant qu'elle était prête à riposter. "Nous agirons de manière calme, soigneusement échelonnée et unifiée, (...) en prévoyant suffisamment de temps pour les pourparlers. Mais nous ne resterons pas inactifs si nous ne parvenons pas à conclure un accord équitable", a déclaré Maros Sefcovic.

Le Lesotho en route pour Washington

Le Lesotho, censé payer la plus lourde addition (+ 50 % de droits de douane), a annoncé qu'il allait envoyer une délégation gouvernementale aux États-Unis.

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"Nous devons nous rendre d'urgence aux États-Unis pour dialoguer avec leurs dirigeants et plaider notre cause", a déclaré le ministre du Commerce du petit royaume enclavé d'Afrique australe, Mokhethi Shelile, à des journalistes, disant craindre "la fermeture immédiate d'usines et les pertes d'emplois".

"Il y a onze usines dans le pays, dont la plupart exportent des marchandises aux États-Unis et fournissent du travail à 12 000 personnes", a souligné Mokhethi Shelile. "Les marchandises actuellement en production seront touchées par ces droits de douane et ne seront pas exportées vers les États-Unis", a précisé le ministre, en indiquant qu'il avait demandé aux usines de continuer à produire pendant que le gouvernement cherche "des solutions".

Ces annonces de Donald Trump montrent que le Lesotho a besoin de "diversifier" ses partenaires commerciaux, a reconnu Mokhethi Shelile, qui dit avoir déjà commencé à étudier d'autres options. "Nous ne pouvons pas compter uniquement sur les États-Unis", a poursuivi le ministre. "Même si cette transition prendra du temps, le processus est déjà en cours."

Ottawa décide de taxer certaines voitures américaines

Le Canada, l'une des cibles favorites de Donald Trump, n'a pas subi de nouveaux droits de douane mercredi. Mais le voisin des États-Unis paie tout de même un tribut croissant dans la guerre commerciale enclenchée par Washington, avec des surtaxes qui touchent déjà une partie de ses exportations. 

Le Premier ministre canadien Mark Carney a annoncé des droits de douane de 25 % sur certaines importations automobiles américaines. Le tarif douanier canadien vise "tous les véhicules importés des États-Unis qui ne respectent pas" l'accord commercial nord-américain AEUMC, a annoncé Mark Carney.

Les droits de douane sur des importations de véhicules américains représentant une valeur de 35,6 milliards de dollars canadiens (25,3 milliards de dollars américains), devraient entrer en vigueur dans les prochains jours, a fait savoir son bureau à l'AFP.

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Les droits de douane canadiens auront une incidence sur les voitures et les camionnettes fabriquées avec moins de 75 % de pièces nord-américaines, soit environ 10 % de tous les véhicules expédiés des États-Unis vers le Canada, ce qui représente environ 67 000 véhicules par an.

Le géant de l'automobile Stellantis a annoncé suspendre la production dans certaines usines au Canada et Mexique.

Le Mexique salue "la volonté de dialogue" de Trump

Épargné par les dernières annonces américaines, le Mexique a salué la "volonté de dialogue" du président américain Donald Trump et sa décision de ne pas imposer de nouveaux droits de douane à son voisin du sud, son premier partenaire commercial.

"Il faut toujours remercier la volonté de dialogue du président des États-Unis", a déclaré la présidente du Mexique Claudia Sheinbaum, en présentant un plan pour le développement de l'économie et en insistant sur la "bonne relation" qu'elle avait construite avec l'administration Trump.

L'absence de droits de douane réciproques marque le maintien du traité de libre-échange, avait ajouté le secrétaire (ministre) de l'Économie Marcelo Ebrard, qui avait parlé de "réussite majeure".

Le Mexique reste exposé aux droits de douane à 25 % déjà annoncés par le président américain sur l'industrie automobile, l'acier et l'aluminium. "Notre objectif dans les 40 prochains jours est d'obtenir les meilleures conditions du monde dans l'industrie automobile, de même que pour l'acier et l'aluminium", a indiqué Marcelo Ebrard.

Le Vietnam va créer une "équipe de réaction rapide"

Le Premier ministre vietnamien a demandé la mise en place immédiate d'une "équipe de réaction rapide" après l'entrée en vigueur de droits de douane massifs de 46 % de la part des États-Unis.

Lors d'une réunion du comité permanent du gouvernement, le Premier ministre Pham Minh Chinh a déclaré que les ministères devaient être "calmes, courageux (et) avoir des réponses proactives, flexibles, opportunes et efficaces à tous les développements", selon un communiqué publié sur le portail d'information officiel du gouvernement.

Le vice-Premier ministre Ho Duc Phoc devrait également s'envoler pour une "visite de travail aux États-Unis".

Avec AFP