Intoxications alimentaires dans l'Aisne : quatre questions sur la contamination à la bactérie E.coli dont sont victimes près de 20 enfants

Une fillette est morte et 18 autres enfants, dont une majorité dans l'agglomération de Saint-Quentin (Aisne), ont contracté la bactérie E.coli depuis le 12 juin. Une enquête judiciaire a été ouverte jeudi 19 juin, en parallèle de l'enquête sanitaire, a annoncé le parquet lundi soir. Quatre boucheries de Saint-Quentin, ainsi que les rayons boucherie de deux supermarchés de l'agglomération, ont été fermés préventivement, et des prélèvements effectués dans ces magasins sont en cours d'analyse. Franceinfo fait le point sur cette contamination d'ampleur.

1 Qu'est-ce que la bactérie E.coli ?

Escherichia coli, appelée communément E.coli, désigne une famille de bactéries, qui sont très loin d'être toutes dangereuses pour la santé. Elles sont présentes en grand nombre dans l'appareil digestif, où une partie d'entre elles jouent un rôle dans le bon fonctionnement de l'organisme. Certaines variétés d'E.coli produisent néanmoins des shigatoxines, une sorte de toxines provoquant des intoxications. Ces dernières se transmettent "à l'homme principalement par des aliments contaminés, comme de la viande hachée crue ou mal cuite et du lait cru", explique l'Organisation mondiale de la santé (OMS). "On associe un nombre croissant de flambées à la consommation de fruits et de légumes – graines germées, épinards, laitues, chou cru, salades", poursuit-elle.

Dans la majorité des cas, ces contaminations se traduisent par des maux de ventre et des diarrhées sans gravité, qui apparaissent trois ou quatre jours après l'ingestion de l'aliment. Dans de rares cas, ces intoxications peuvent néanmoins provoquer des complications, avant tout chez les jeunes enfants et les personnes âgées. Il s'agit le plus souvent d'un syndrome hémolytique et urémique (SHU). Il se traduit généralement par une insuffisance rénale aiguë et de graves problèmes sanguins, avec comme possibles conséquences un coma ou la mort.

"On estime que, pour jusqu'à 10% des patients, l'infection à E.coli productrice de shigatoxines peut évoluer en SHU, avec un taux de létalité de 3 à 5%", explique l'OMS. Le SHU est donc une maladie peu fréquente, avec entre 70 et 250 enfants touchés chaque année, relève Santé publique France. Mais les traitements contre le SHU sont encore incertains.

2 Comment les enfants concernés ont-ils été contaminés ?

Les 19 enfants victimes d'intoxications alimentaires sévères dans l'Aisne et dans la Marne ont bien été contaminés par une forme de bactérie E.coli, a confirmé dimanche le ministre de la Santé, Yannick Neuder. La cause de la contamination n'est pas encore connue avec certitude. "A ce stade, la cause la plus probable de la contamination est la consommation de viande" a rappelé lundi la préfecture, tout en soulignant que "la restauration scolaire n'[étai]t ciblée dans aucun des cas recensés".

En parallèle de l'enquête sanitaire, une enquête préliminaire contre X a été ouverte jeudi "des chefs d'homicide involontaire, blessures involontaires, mise en danger de la vie d'autrui et tromperie sur la marchandise présentant un danger pour la vie humaine", a annoncé le parquet de Saint-Quentin.

3 Comment vont les jeunes patients ?

Parmi les 19 enfants contaminés, huit d'entre eux, âgés de 1 à 12 ans, ont développé un SHU. L'un d'eux, une fillette de 12 ans, est morte de cette complication le 16 juin. Lundi soir, six enfants ayant contracté un SHU étaient toujours sous dialyse, tandis que dix autres enfants avaient pu quitter l'hôpital et rentrer chez eux, tout en faisant l'objet d'un "suivi médical continu", a rappelé la préfecture dans un communiqué.

4 Quelles mesures ont été mises en place pour stopper la contagion ?

Quatre boucheries de Saint-Quentin, ainsi que les rayons boucherie de deux supermarchés de l'agglomération, ont été fermés préventivement ces derniers jours. Il s'agit de la boucherie La Direction, boulevard Henri Martin ; de la boucherie Family, 3 bis boulevard Gambetta ; de la boucherie El Baraka, 52 avenue Robert Schuman et de la boucherie La Fayette, 100 rue Raspail. L'activité du rayon boucherie du supermarché TMS Destock/ TMS market, 4 rue du 19 mars 1962, et celle du rayon boucherie de l'Intermarché de Gauchy, rue Auguste Delaune, ont aussi été arrêtées.

Des prélèvements effectués dans ces magasins sont en cours d'analyse et sont attendus "d'ici la fin de la semaine", selon la préfecture. "Les enquêtes alimentaires sur l'origine des contaminations réalisées ces deux derniers jours n'ont pas mis en évidence de nouveaux commerces", a-t-elle ajouté lundi. Une cellule d’information du public est joignable au 09 70 80 90 40 de 8 heures à 18 heures.

La préfecture a aussi appelé les parents à la vigilance. "Si vous avez acheté des produits depuis le 1er juin dans l'une de ces six boucheries, ne les consommez pas. Si vous ou vos enfants avez consommé des denrées issues de ces six établissements, surveillez votre état de santé. Faites le 15 sans attendre en cas de diarrhées glairo-sanglantes", a prévenu la préfecture. Celle-ci appelle notamment à la prudence les personnes s'étant rendues à l'événement sportif Festival des petits as organisé à Saint-Quentin les 21 et le 22 juin, et à la fête du mini-basket de Gauchy organisée le 21 juin, puisque de la viande issue des boucheries fermées a été consommée à ces deux occasions.

Les autorités ont par ailleurs rappelé les mesures d'hygiène à observer pour éviter les intoxications alimentaires : se laver les mains avant de cuisiner, cuire la viande à cœur, laver les légumes, les fruits et les herbes aromatiques, spécialement lorsqu'ils sont consommés crus, nettoyer les ustensiles de cuisine et les plans de travail, en particulier lorsqu'ils ont été en contact préalablement avec des aliments crus, mettre au réfrigérateur et consommer rapidement les restes alimentaires, ne pas faire consommer de produits à base de lait cru aux enfants de moins de 5 ans et ne pas donner à boire aux enfants de l'eau non traitée (eau de puits, torrent, etc.).