« Il y a des changements, mais le pouvoir masculin est toujours en place », rappelle Geneviève Sellier
Professeure émérite en études cinématographiques à l’université Bordeaux-Montaigne, Geneviève Sellier a cofondé le site collectif Le genre et l’écran, qui propose « à un large public des analyses féministes des fictions audiovisuelles (cinéma et télévision) ». Après avoir écrit de nombreux ouvrages sur le cinéma et la télévision au prisme des rapports de sexe, l’autrice signe aujourd’hui « le Culte de l’auteur » (la Fabrique). Elle y démonte les rapports de pouvoir dans le cinéma français et le mythe du génie, qui favorise les violences de genre.
Pourquoi avoir écrit ce livre ?
Avec l’arrivée de #MeToo en France, mes travaux ont commencé à sortir de leur placard. Mes livres sont traduits en anglais, lus en Grande-Bretagne, aux États-Unis, jusqu’en Nouvelle-Zélande, mais en France ça ne passe pas. J’ai eu quelques alliées quand même, des historiennes féministes comme Michelle Perrot, qui a signé la préface de « la Drôle de Guerre des sexes du cinéma français, 1930-1956 », ou Christine Bard dans la jeune génération. La situation est devenue un peu plus ouverte depuis 2017, et surtout depuis la deuxième vague #MeToo, en 2024. C’est donc très récent. Après avoir rédigé des ouvrages universitaires, je me suis dit qu’il fallait absolument ajouter ma pierre à l’édifice, sur un mode de vulgarisation. « Le Culte de l’auteur » est le résultat de trente années de recherches, actualisées bien sûr et adaptées au grand public. Mais la réception de mon livre est extrêmement clivée, parce que j’attaque le cœur de la forteresse, c’est-à-dire la cinéphilie institutionnelle. Je mets en cause le cinéma d’auteur, qui est un objet sacré en France, et en particulier pour l’élite cultivée.
En quoi ce cinéma d’auteur et le statut d’auteur ont-ils pu autoriser de la violence sur les plateaux ?