Objets tranchants, prières «excessives», menaces... La détention houleuse du terroriste de la basilique de Nice
Le Figaro Nice
En détention provisoire depuis presque quatre ans, l’assaillant de l’attentat de la basilique de Nice, qui avait fait trois morts à l’arme blanche le 29 octobre 2020, n’a, semble-t-il, rien perdu de sa dangerosité. Qualifié de «taré» par l’un de ses ex-codétenus et placé sous le statut de détenu particulièrement signalé (DPS), Brahim Aouissaoui, n’a eu de cesse de se faire remarquer au fil des ans. À tel point qu’il a fallu le changer quatre fois de centre pénitentiaire.
Grièvement blessé par balles lors de son interpellation, ce dernier a été d’abord détenu à l’Unité hospitalière sécurisée interrégionale (UHSI) avant de rejoindre l’hôpital pénitentiaire de Fresnes le 28 décembre 2020. À cette période, il a notamment dissimulé des couteaux en plastique dans son fauteuil roulant. Ce qui lui a valu de gagner, à partir d’avril 2021, le quartier d’isolement de la maison d’arrêt de Fresnes. Une expertise médicale faisait déjà état d’un comportement hostile, opposant, voire narquois ou autoritaire. Il était par ailleurs question de son absence «revendiquée» de souvenirs s’agissant de l’attentat de la basilique Notre-Dame.
Musculation, religion et rébellion
Provocateur, Brahim Aouissaoui s’est offert de discuter par la fenêtre de sa cellule avec d’autres détenus mis en cause dans des affaires de terrorisme, tels Muhammad Usman et Réda Kriket, le premier étant lié aux attentats de Paris en novembre 2015. Isolé et ne suivant que peu d’activités, le jeune homme s’est retranché derrière la musculation et une pratique assidue de la religion musulmane. En ce sens, l’aumônier musulman de la prison a demandé à ne plus le rencontrer après un premier entretien avec lui.
Se sont ensuivis à Fresnes sept signalements d’incidents disciplinaires en sept mois, qui lui ont valu de faire l’objet d’une gestion menottée. Il est question de tapage, refus de se soumettre aux mesures de sécurité et aux injonctions du personnel, rébellions, obstruction à l’œilleton de sa cellule, etc. Fin 2021, le terroriste présumé a également mimé le fait de pointer une arme de poing vers un surveillant.
Des aveux
Transféré le 7 juin 2022 à la maison d’arrêt de Meaux (Seine-et-Marne), il a été placé d’office à l’isolement. Il n’a, sans surprise, pas manqué d’attirer une nouvelle fois l’attention des agents, notamment par ses prières «excessives». Se référant à l’attentat du Bataclan, il a aussi fait part à l’un de ses codétenus de menaces qu’il pourrait mettre à exécution si l’administration pénitentiaire ne lui donnait pas pleine satisfaction. Il lui aurait encore confié être venu de Tunisie pour «tuer des gens» et qu’il prévoyait de se «venger» après avoir essuyé les balles des agents municipaux.
Nouveau transfert le 23 juin 2022, cette fois au centre pénitentiaire de Beauvais, et nouveau record : dix signalements en l’espace de trois mois. Le 16 juillet par exemple, un coupe-ongles de grande taille a été découvert dissimulé dans des sacs en plastique lors de la fouille de sa cellule. Idem le 10 septembre, l’objet étant cette fois caché dans une boîte de lessive. Le 27 juillet, l’administration a été avisée d’une conversation entre le mis en cause et un détenu, membre de la mouvance islamiste radicale. Brahim Aouissaoui lui demandait alors de lui trouver un rasoir. Le jour même, une aiguille à coudre était découverte dans sa cellule...
Il était tout fier de m'expliquer que c'était lui (l’auteur de l’attentat) et qu'il a tué un prêtre et des femmes
Un codétenu de Brahim Aouissaoui.
Le 13 septembre, il aurait, en outre, confié à un autre codétenu être l’auteur de l’attentat de Nice. Et ce dernier de préciser les aveux : «Il était tout fier de m’expliquer que c’était lui (l'auteur de l'attentat, NDLR) et qu’il a tué un prêtre et des femmes». Brahim Aouissaoui se serait en ce sens vanté d’avoir accompli une «œuvre». Transféré à la maison d’arrêt de Bois-d’Arcy (Yvelines) fin 2022, puis dans celle de Villenauxe-la-Grande (Aube) le 25 avril 2023 - où il réside toujours -, le terroriste présumé a été successivement trouvé en possession d’un nouveau coupe-ongles dissimulé dans un lecteur CD et d’une paille en carton taillée en pointe. Passé les innombrables autres manquements au règlement, le jeune homme, âgé aujourd’hui de 25 ans, a aussi traité en français et par deux fois un agent pénitentiaire de «sale cochon !». Lui qui, pourtant, ne parlerait pas notre langue. Il sera jugé du 10 au 28 février 2025 devant la Cour d’assises spéciale de Paris pour «assassinats et tentatives d'assassinats en relation avec une entreprise terroriste».