Frappes israéliennes sur l'Iran : "On a affaire à un tournant", affirme le géopolitologue Frédéric Encel
"On a affaire à un tournant", affirme vendredi 13 juin sur France Inter le géopolitologue Frédéric Encel, après les frappes israéliennes de la nuit sur l'Iran. Ces frappes ont visé des sites militaires et nucléaires iraniens et ont notamment touché la capitale Téhéran et l'usine d'enrichissement d'uranium de Natanz. Elles ont été "couronnées de succès", a déclaré le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou. L'Iran a averti qu'il avait le "droit légal et légitime" de répondre à ces attaques.
"Les menées anti-nucléaires israéliennes et américaines ont commencé dans les années 2010, puis ça s'est accru à la fois en quantité et en qualité. Mais je pense que là, on a affaire à un tournant", estime Frédéric Encel. "C'est la première fois que Nétanyahou évoque à la fois les risques de nouvelle Shoah mais également un passage biblique. Il le fait de manière extrêmement solennelle et en anglais, donc il s'adresse au public et à l'administration américaine. Donc, je pense qu'on a affaire à quelque chose de plus important", explique le géopolitologue, auteur de La guerre mondiale n'aura pas lieu" (Odile Jacob).
"Israël démontre qu'il peut se permettre à peu près tout dans l'espace aérien" et sur le territoire iraniens
Le spécialiste de la région voit dans ces frappes un "objectif double". Il s'agit de "frapper les têtes, à la fois de l'organisation militaire et les ingénieurs. Ce n'est pas nouveau, mais là en une seule frappe, il semble qu'au moins plusieurs très hauts militaires aient été abattus, dont l'un des chefs d'état-major de l'armée iranienne". Le général Mohammed Bagheri a en effet été tué dans l'attaque israélienne, a indiqué la télévision d'État iranienne. Par ailleurs, "Israël démontre, et c'est l'un des objectifs, qui est assez psychologique, qu'il peut se permettre à peu près tout dans l'espace aérien, dans les villes et dans les états-majors iraniens", ajoute Frédéric Encel.
Cette attaque intervient alors qu'un nouveau cycle de négociations entre les États-Unis et l'Iran sur le nucléaire iranien devait avoir lieu dimanche sur fond de fortes tensions. Jeudi, le Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) avait adopté une résolution condamnant l'Iran pour "non-respect" de ses obligations nucléaires. Avec ces frappes, "on a l'expression d'une inquiétude supplémentaire, il semble que les Américains et les Israéliens aient disposé de sources très claires indiquant qu'on se trouve à quelques semaines ou quelques mois de l'obtention potentielle d'une bombe par l'Iran", estime le géopolitologue.