C'est un effrayant phénomène, encore inconnu du grand public, qui a émergé dans les années 2010 puis explosé depuis les confinements en 2020 : les viols d'enfants, réalisés en direct sur Internet, par des familles pauvres pour des commanditaires européens. C'est ce que les autorités appellent le «livestreaming».
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Pour une somme dérisoire, entre 15 et 100 dollars, des hommes, pour la plupart européens, commandent, depuis leur ordinateur chez eux, des viols d'enfants sur des plateformes de visioconférence, comme Skype ou WhatApp. À l'autre bout de la planète, souvent dans les pays d'Asie du Sud-est, des familles acceptent de filmer leurs enfants, qu'il s'agisse de nourrissons ou de jeunes adolescents, reproduisant un « show » -comprendre un scénario sexuel imaginé par le commanditaire européen. « L'auteur précise ce qu'il veut, c'est-à-dire le type d'abus sexuels qu'il veut voir effectuer. Il peut fixer l'âge de la victime, le sexe de la victime, les vêtements qu'elle va porter, mais aussi désigner la personne qui va commettre les abus sur l'enfant le jour J», décrit Gabrielle Hazan, chef de l'Office des mineurs.
Créé en septembre 2023 et entièrement dédié aux violences faites aux enfants, l'Office des mineurs a fait face, en seulement un an, à une explosion des signalements pédocriminels, dont une partie est liée à ces phénomènes de « livestreaming ». Le dossier que Gabrielle Hazan nous expose, a donné lieu début 2024 à une condamnation inédite en France, pour consultation de fichiers pédopornographiques et complicité de traite des êtres humains à l'égard de mineurs. Une première dans l'hexagone : l'accusé – un patron yvelinois - a été condamné par le tribunal de Paris à trois ans de prison dont deux fermes pour des agressions sexuelles de mineures aux Philippines et au Kenya.
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Dans cet objectif, les effectifs de l'Office des mineurs vont être renforcés avec la création de cinq antennes régionales, alors que les officiers de police judiciaires collaborent déjà étroitement avec de nombreux homologues européens. Ces affaires complexes ont nécessairement une dimension internationale et se déroulent, pour partie, hors du sol français. Le but de cette montée en puissance : « Réduire les taux de classement sans suite qui sont bien trop élevés », regrette Gabrielle Hazan, mais dont le pôle répond toutefois à une prise de conscience de l'ampleur et de la gravité des crimes et délits commis envers les mineurs.
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