Appréciation de l’âge des «mineurs isolés» à la frontière franco-italienne : la justice rejette la suspension du dispositif

Le tribunal administratif de Nice a rejeté, mercredi, une requête formulée par des associations d’aide aux migrants qui estimaient illégale la procédure de prise en compte des présumés mineurs isolés dans les Alpes-Maritimes. Ces dix associations, parmi lesquels La Cimade, la Ligue des droits de l’Homme, Emmaüs Roya, le Secours catholique, mais aussi les syndicats de la magistrature et des avocats de France, demandaient la suspension d’un protocole expérimental à la frontière franco-italienne pour apprécier plus efficacement l’âge de ces étrangers en situation irrégulière, qui pour une partie, se disent mineurs.

Ce dispositif, établi en 2021 entre les différentes autorités - le préfet, les procureurs de Nice et Grasse et le conseil départemental - permet à des agents du département de procéder à des entretiens d’appréciation de minorité directement au poste frontière de Menton, et donc, de décider dans la foulée de leur admission temporaire ou non sur le territoire français. «C’est un procédé qui permet de fiabiliser la décision des policiers et d’éviter des prises en charge d’individus en réalité majeurs», résume un fonctionnaire chargé de ce sujet.

Les associations contestaient cette procédure, rappelant que la loi oblige à une prise en compte des présumés mineurs non accompagnés (MNA) par l’aide sociale à l’enfance, une compétence départementale. Ces dernières années, ces collectifs alertaient de renvois arbitraires face à une trop forte pression migratoire et d’un manque de places dans les foyers. «De nombreux témoignages font état de fausses dates de naissance enregistrées par les policiers pour justifier ces refoulements», déploraient ces associations dans un communiqué l’été dernier.

«Dans le cadre du contrôle aux frontières»

La justice ne leur a pas donné raison sur l’illégalité de ce protocole spécial dans les Alpes-Maritimes, même si un jugement sur le fond de l’affaire sera rendu ultérieurement. «Le juge des référés a considéré que les moyens soulevés par les requérants ne paraissaient pas, en l’état de l’instruction, propres à créer un doute sérieux sur la légalité du protocole d’accord», a expliqué le tribunal administratif de Nice dans un communiqué. Pour la juridiction, ce dispositif «s’inscrit dans le cadre de l’exercice propre de la compétence de l’État relative au contrôle aux frontières intérieures», a-t-elle précisé.

En 2023, la pression migratoire dans les Alpes-Maritimes a été particulièrement importante, en lien avec les arrivées de nombreuses personnes étrangères sur le sol italien, beaucoup cherchant ensuite à rejoindre la France en passant par Menton et ses hauteurs. Dans ce département, plus de 5800 «MNA» ont été recensés par les autorités (contre 3900 en 2022). Cette année, les tentatives de franchissement de la frontière sont moins nombreuses : d’après les chiffres les plus récents, en date de cet été, 2300 mineurs isolés avaient été pris en charge contre près de 4000 à la même époque l’an dernier.