Festival de Cannes 2025 : dans "Mission: Impossible. The Final Reckoning", Tom Cruise et Christopher McQuarrie livrent une fin de saga apocalyptique
Mission: Impossible. The Final Reckoning (Le Dernier jugement), projeté en première mondiale au Festival de Cannes mercredi 14 mai (et dans les salles le 21 mai), est censé être l'ultime épisode d'une saga démarrée en 1996 au cinéma. Tom Cruise, acteur mais aussi coproducteur, tout comme Christopher McQuarrie, le réalisateur des trois derniers opus de la franchise et également coproducteur et coscénariste, ont donc vu les choses en grand. Dans un long-métrage à la pointe de la technologie, parce que pensé dès le début pour le format Imax, ils ont joué sur la complicité développée avec les fans depuis trois décennies et misé à fond, presque trop même, sur la patte Mission: Impossible, à savoir les cascades stupéfiantes et improbables.
Le monde est au bord de l'Apocalypse parce que l'Entité, une intelligence artificielle surpuissante, colonise les esprits et menace la planète d'une explosion nucléaire mondiale en s'apprêtant à lancer les bombes atomiques de tous les pays qui en possèdent une. Ethan Hunt, lui, a disparu des radars depuis la découverte, dans Mission: Impossible. Dead Reckoning, de la fameuse clé cruciforme qui mène à un mystérieux sous-marin russe, le K-559 Sebastopol, qui abrite le Podkova lié à l'Entité.
C'est la présidente des États-Unis (Angela Bassett) elle-même qui le supplie de reprendre du service. Il accepte évidemment, lui, le sauveur du monde. "The world needs you" (le monde a besoin de toi), répète-t-on à Ethan Hunt tout au long du film. Le personnage ne cesse de jouer la carte de l'humilité, mais l'alias cinématographique de Tom Cruise est devenu "L'Élu", érigé en dieu vivant et combattant justement l'anti-Dieu, la menace actuelle qui avait été évoquée, la première fois, dans Mission : Impossible III.
La description du monde dans cet ultime volet fait étrangement écho à celui d'aujourd'hui : la planète semble au bord de la guerre, les régimes autoritaires s'y multiplient et elle est submergée par les fausses informations. En outre, le discours est politique et dépeint une Amérique responsable et réfléchie, confirmant au passage que l'on est bien au cinéma.
Nostalgie quand tu nous tiens
Au début du film, des visages familiers du passé envahissent l'écran, notamment tous les méchants. La nostalgie est un pilier de l'intrigue. Les aficionados seront émus par cette évocation d'une saga qui les a accompagnés sur plusieurs décennies. Le scénario est tellement bien écrit qu'il répond au premier opus de la franchise et permet de faire le lien et des clins d'œil aux différents épisodes.
Par ailleurs, les inconditionnels noteront que Tom Cruise a bien respecté l'alternance cheveux longs/cheveux courts : le personnage de Grace (Hayley Atwell) le souligne. Le volet 8 montre donc un Ethan Hunt, avec une masse capillaire plus fournie que celui du premier volet et de l'épisode précédent. On retrouve aussi, un peu moins que les fois précédentes, le fameux masque qui rend les déguisements parfaits. Mission: Impossible confirme aussi son tropisme français avec la bien nommée Paris (Pom Klementieff) avec qui Ethan communique toujours dans la langue de Molière.
Côté cascades, la fameuse scène promise depuis des mois par Tom Cruise se découvre enfin. Si elle est somptueuse, elle met aussi en relief le principal point faible de cette fin de cette saga : les scènes majeures, truffées de cascades, sont trop longues. Quand Ethan plonge dans les abysses, on a presque l'impression qu'il n'en ressortira jamais tant les obstacles s'enchaînent. Il en est de même pour son aventure rocambolesque avec l'hélicoptère jaune des images du film déjà en circulation. Sans parachute, il voltige dangereusement dans le ciel. Sur terre, Ethan continue de courir, cette fois-ci pour retrouver son fidèle ami Luther interprété par Ving Rhames, dont le génie informatique est déterminant dans cette nouvelle mission. L'ingénieux Benji, incarné par Simon Pegg, l'est tout autant.
Le temps de l'action
Mission: Impossible. The Final Reckoning, film d'action par excellence, est une réflexion inattendue sur les limites du corps. Tom Cruise se dévoile en boxer noir et incarne un Ethan Hunt qui affronte ses limites physiques, celles d'un homme qui a vieilli mais qui l'assume. Le propos est d'ailleurs renforcé par le magnifique plan d'une position fœtale, début d'une métaphore sur la maternité et la (re)naissance dans laquelle le personnage de Grace est central.
Cette douceur infuse par petites touches le film. On a souvent fait le tour du monde dans Mission : Impossible, mais ici les paysages sont moins urbains et plus apaisants. Une nature verdoyante succède ainsi aux somptueux paysages glaciaires. Christopher McQuarrie s'est appesanti sur l'esthétique de ses plans et a voulu prendre son temps. Il faut dire que The Final Reckoning en abuse en s'étirant sur 2h49.
Mais quand on aime, on ne compte pas. L'adage vaut aussi bien pour Tom Cruise, qui s'est targué de faire des films pour divertir autant les cinéphiles que le grand public. À Cannes, l'acteur a rendu hommage aux fans en signant de nombreux autographes avant la montée des marches. La production de The Final Reckoning, à l'instar de Tom Cruise lui-même, s'est fait plaisir. Celui qui a sauvé le cinéma américain après le Covid et la grande grève de Hollywood, selon Steven Spielberg, mérite bien notre bienveillance cinéphilique. Et comme pour se faire pardonner, le long-métrage offre une réplique bientôt culte lors d'une scène de combat avec un homme endoctriné par l'intelligence artificielle : "Tu passes trop de temps sur internet", lui lance excédé Ethan Hunt qui semble ne pas avoir encore dit son dernier mot.