Pesticide interdit produit en France : "C'est du racisme environnemental", s'insurge le rapporteur spécial des Nations unies sur les droits de l'homme

"C'est du racisme environnemental !", s'insurge mardi 19 août sur franceinfo, Olivier De Schutter, rapporteur spécial des Nations unies sur les droits de l’homme, juriste belge et professeur de droit international à l’Université catholique de Louvain. Le Fastac, un pesticide interdit en Europe, continue d'être fabriqué en grande quantité en France, près de Lyon, sur le site du groupe chimique BASF de Genay, selon un rapport. Il est ensuite exporté à l'étranger.

"Je ne vois pas pourquoi on devrait tolérer que des produits trop dangereux pour nous, ne soient pas trop dangereux dans les populations dans les pays en développement", dénonce Olivier De Schutter. "La France, et d'autres pays, continuent de tolérer que des entreprises comme BASF, mais aussi Bayer ou Syngenta, continuent de produire dans l'Union européenne, des pesticides interdits souvent depuis de nombreuses années en raison de leur toxicité pour l'humain, pour les exporter dans les pays en développement" comme l'Inde, le Brésil, l'Afrique du Sud ou encore le Vietnam. Ironie du sort, "ce sont ensuite des pays dont on va importer des produits alimentaires, ce qui pose la question de la protection de la santé des consommateurs, mais aussi la santé des travailleurs agricoles dans ces pays", pointe le rapporteur spécial.

La Commission "s'est engagée à interdire ce type de production en vue de l'exportation", mais "pour l'instant, dans l'Union européenne on continue de tolérer que soient produits des pesticides trop dangereux pour nous, mais apparemment pas trop dangereux pour les populations dans les pays en développement". "Avec ce paradoxe que finalement le consommateur européen importe des produits, du thé, du café, des épices, des agrumes, des bananes qui sont très contaminés par ces produits", souligne-t-il.

"Beaucoup d'hypocrisie"

"Il faut que l'Union européenne se mobilise là-dessus", plaide Olivier De Schutter, qui reconnaît qu'il est compliqué pour un pays seul comme la France de prendre seul cette initiative car "n'oublions pas que les producteurs de pesticides, ce sont 1,2 million de personnes employées dans l'Union européenne". Face au risque que la production de pesticides soit simplement délocalisée hors de l'UE, et revienne malgré tout aux consomamteurs, il résume : "Il faut aller vers l'interdiction de ces produits qui sont extrêmement dangereux et dont les effets sur la santé sont avérés depuis de longues années". Tant qu'on ne bannira pas ces produits, il ne sera pas possible pour leurs alternatives d'émerger", pointe le spécialiste.

"Il y a beaucoup d'hypocrisie dans la situation actuelle, où l'on prétend protéger la santé des consommateurs, mais où l'on veut, malgré tout, maintenir les bénéfices économiques de la présence sur notre territoire de producteurs chimiques qui produisent ces produits dangereux, pourvu que l'on ne voie pas ces produits utilisés chez nous, et pourvu qu'ils soient exportés dans des États où la corruption est plus importante et les réglementations environnementales plus faibles", résume-t-il.