À la tête de la FNSEA, qui est Arnaud Rousseau, le businessman qui voulait passer pour un paysan ?

Au moment où la pétition contre la loi Duplomb totalise, lundi 21 juillet au matin, près d’1,2 million de signatures sur le site de l’Assemblée nationale, Arnaud Rousseau a fermement défendu cette dangereuse loi, au micro de Franceinfo. « Cette opposition permanente entre production et environnement est intenable dans notre pays, a-t-il déploré. L’objectif est de continuer à produire en France une des alimentations les plus sûres au monde, avec des moyens qui nous permettent de le faire. »

Autant de déclarations qui tendent à défendre un texte actant de nombreux reculs environnementaux, adopté au Parlement le 8 juillet sans débat démocratique. Cette législation prévoit, entre autres, la réintroduction de l’acétamipride, un pesticide qui fait peser des risques sur la santé humaine.

Un habitué des assemblées générales d’actionnaires

Mais qui est cet ardent défenseur de la loi Duplomb ? Arnaud Rousseau a un grand nombre de casquettes, ou plutôt de chemises. Si celle-ci est à carreaux, il incarne l’agriculteur et le dirigeant de la FNSEA, principal syndicat du secteur qui revendique 212 000 adhérents. Lorsqu’elle est bleu pâle avec cravate en soie, on est face au grand patron, habitué des assemblées générales d’actionnaires et qui parle en millions d’euros.

Arnaud Rousseau, dont le 78e congrès de la FNSEA est le premier en tant que président, est un homme très occupé. On le retrouve administrateur ou dirigeant d’une grosse quinzaine d’entreprises, de holdings et de fermes : directeur de la multinationale Avril (Isio4, Lesieur, Matines, Puget, etc.), administrateur de la holding du même nom, directeur général de Biogaz du Multien, spécialisé dans la méthanisation, administrateur de Saipol, leader français de la transformation de graines en l’huile, président du conseil d’administration de Sofiprotéol, qui finance des crédits aux agriculteurs. La liste est longue.

Comme patron d’exploitations agricoles, il ne possède pas moins de 700 hectares, principalement des céréales oléagineuses (colza, tournesol) mais aussi du blé, de la betterave, du maïs, et de l’orge. Il est aussi maire (sans étiquette) de sa commune Trocy-en-Multien (Seine-et-Marne) et vice-président de la communauté de communes du pays de l’Ourcq.

Deux classes d’agriculteurs bien différentes

Sur sa biographie officielle du groupe Avril, il est dit qu’Arnaud Rousseau a « un parcours atypique ». Pour un agriculteur, certes, beaucoup moins pour un dirigeant, puisqu’il est diplômé de l’European Business School de Paris et qu’il est passé un temps par le courtage de matières premières agricoles, c’est-à-dire leur mise en vente sur les marchés financiers.

Ces contradictions se retrouvent dans ses prises de position. Il défend une agriculture productiviste française pour nourrir les Français, mais consacre ses champs à une production majoritairement destinée à l’export. Il soutient les agriculteurs qui se plaignent de l’augmentation des taxes sur le gazole non routier (GNR), mais il a entériné cette hausse cet été, lors des négociations avec le gouvernement sur le projet de loi de finances.

Avec ses homologues grands céréaliers, il est l’un des principaux bénéficiaires de la PAC, quand les petits éleveurs, ceux-là mêmes dont la colère a débordé en début d’année, sont les plus lésés. Ce sont deux classes d’agriculteurs bien distinctes, aux intérêts antagonistes. C’est pourquoi il ne peut répondre aux demandes des manifestants sur la hausse du GNR, qu’il a validée, ni sur les marges des groupes agroalimentaires, lui qui en dirige un. Alors, Arnaud Rousseau a un bouc émissaire tout trouvé : l’Europe et ses normes écologiques.