Manger chez un étoilé sans exploser son budget, c’est désormais possible. Dans son établissement de La Colle-sur-Loup, dans les Alpes-Maritimes, le chef Alain Llorca innove là où on ne l’attendait pas : au moment de l’addition. Depuis tout juste une semaine, les clients de son restaurant peuvent régler leur repas en trois fois sans frais, une initiative inédite dans le monde de la gastronomie française.
En ouvrant le site internet du restaurant, le ton est donné : «Nouveau. Règlement en 3x sans fois ! Dès aujourd’hui, réglez votre repas en trois fois, sans frais, ni intérêts. Simple, pratique et convivial !». Une offre qui s’appliquera à l’ensemble des prestations proposées, du menu gastronomique aux chambres d’hôtel du domaine. Concrètement, le client pourra ainsi s’offrir un déjeuner étoilé à 85 euros pour 28 euros par mois, ou encore un menu du soir à 240 euros pour environ 80 euros par échéances. Le tout, sans coût supplémentaire : la banque se charge de prélever le client en trois fois, tandis que le restaurateur est payé immédiatement, en échange de 2,5% d’intérêts versés à la banque.
Une réponse à la conjoncture économique actuelle, explique le chef. «Le pouvoir d’achat des gens a baissé, celui des retraités aussi, et c’est notre première clientèle. Aujourd’hui, on doit proposer des solutions alternatives». Selon une étude de Kantar pour Floa Bank, 32% des Français utilisent de façon récurrente le paiement fractionné, une pratique aujourd’hui devenue courante dans de nombreux secteurs. «On utilise le trois fois sans frais à n’importe quelle sauce, donc je me suis posé la question, si c’était bien pour un restaurant gastronomique», confie Alain Llorca. «C’est un mode de paiement qui est rentré dans les mœurs. C’est un levier, une alternative pour le Michelin, parce qu’on dit que les restaurants étoilés sont chers, mais on apporte une qualité de service, de produits, de la passion».
«Une trentaine en une semaine»
Pour le chef de 57 ans, étoilé depuis de nombreuses années, cette option est aussi un moyen d’ouvrir les portes de son établissement à un nouveau public. «Notre clientèle, c’est 70% de clients étrangers. Donc proposer cette alternative de paiement, c’est aussi ouvrir notre restaurant à la clientèle française, et c’est aussi le moyen de faire découvrir le patrimoine culinaire français aux gens qui n’avait pas forcément les moyens de venir». Et les premiers retours semblent lui donner raison : «J’ai eu énormément d’appels pour des réservations depuis l’annonce. Déjà une trentaine en une semaine. Les clients sont ravis, les retours sont extraordinaires».
Si la baisse de fréquentation dans son restaurant reste modérée, elle n’est pas anodine. Pour le chef étoilé, le constat est simple. «Les modes de consommation des restaurants ont changé, la pression financière a changé, donc on s’adapte. Il n’y a pas à rougir, je pense que c’est une nécessité. Le changement et les évolutions doivent se faire quand ça va bien et il ne faut attendre que ça aille mal». Au-delà de l’aspect financier de cette initiative, c’est une véritable philosophie que défend Alain Llorca. «Ça fait un moment que cette idée me trottait dans la tête. Il faut toujours surprendre le client. Il faut innover, aussi bien dans l’aspect culinaire que dans la gestion», détaille le chef étoilé, avant de conclure : «pour moi, c’est essentiel aujourd’hui».